Lephotographe Antoine Bruy est parti Ă  la rencontre de ceux qui ont choisi de vivre en marge des villes et de leurs fracas. C’est autant une sĂ©rie de portraits que le carnet de bord d’une Chers fans de CodyCross Mots CroisĂ©s bienvenue sur notre site Vous trouverez la rĂ©ponse Ă  la question Mode de vie des artistes en marge de la sociĂ©tĂ© . Cliquez sur le niveau requis dans la liste de cette page et nous n’ouvrirons ici que les rĂ©ponses correctes Ă  CodyCross Saisons. TĂ©lĂ©chargez ce jeu sur votre smartphone et faites exploser votre cerveau. Cette page de rĂ©ponses vous aidera Ă  passer le niveau nĂ©cessaire rapidement Ă  tout moment. Ci-dessous vous trouvez la rĂ©ponse pour Mode de vie des artistes en marge de la sociĂ©tĂ© Mode de vie des artistes en marge de la sociĂ©tĂ© Solution BOHÈME Les autres questions que vous pouvez trouver ici CodyCross Saisons Groupe 76 Grille 4 Solution et RĂ©ponse.
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ModeDe Vie Des Artistes En Marge De La SociĂ©tĂ©; Il Vit Sans Regles, En Marge De La Societe; Elle Vit En Marge De La Societe; Mene Une Existence Au Jour Le Jour En Marge De La Societe; Vivre Pour Vivre ; Vivre Sans Foi Ca Marche, Mais Peut-On Vivre Sans Foie ? A Du Mal À Vivre En SociĂ©tĂ©; SociĂ©tĂ© DĂ©pendant D'une SociĂ©tĂ© MĂšre; Mit En

1Ce chapitre se propose d’éclairer le rĂŽle de l’art et des artistes dans les sociĂ©tĂ©s française, espagnole et anglaise du xviie siĂšcle. Le xviie siĂšcle voit dans les pays considĂ©rĂ©s l’affirmation de l’écrivain et de l’artiste qui doivent leur place sociale nouvelle aux fonctions que leurs Ɠuvres remplissent, au service des pouvoirs spirituels et temporels. Lettres et arts partagent au xviie siĂšcle un mĂȘme souci de la rhĂ©torique, c’est-Ă -dire du maniement des moyens de faire voir et comprendre Ă  autrui, pour la plus grande gloire du souverain, de la religion, ou la dĂ©lectation d’un collectionneur. L’existence de modĂšles et de rĂšgles, la plupart issus de l’AntiquitĂ© et sans cesse retravaillĂ©s, Ă©loigne Ă©galement l’artiste du xviie siĂšcle de notre idĂ©al romantique du crĂ©ateur original, voire incompris. 2Aussi convient-il dans un premier temps de tracer un portrait d’ensemble de la condition des artistes qui restitue leur place particuliĂšre dans la sociĂ©tĂ©. Il s’agit d’un monde hiĂ©rarchisĂ©, notamment en France au sein des structures acadĂ©miques, bien que ces derniĂšres n’exercent jamais qu’un contrĂŽle imparfait sur l’activitĂ© artistique. Dans un deuxiĂšme temps, on s’attachera Ă  comprendre comment le dĂ©veloppement des collections et du marchĂ© de l’art modifie les anciens liens de dĂ©pendance par rapport Ă  la commande publique et privĂ©e. On assiste au xviie siĂšcle Ă  une transformation de la valeur du produit artistique, parallĂšle Ă  l’émergence de l’individu social artiste ». Une troisiĂšme partie se propose, Ă  la lumiĂšre des conditions de production de l’Ɠuvre esquissĂ©e jusqu’ici, de s’interroger sur la reprĂ©sentation de la sociĂ©tĂ© dans les arts. Quelques exemples permettront de rappeler l’intĂ©rĂȘt mais aussi les problĂšmes posĂ©s par les documents littĂ©raires et artistiques en histoire sociale. IdentitĂ© de l’art et des artistes Émergence des notions d’art et de littĂ©rature. Promotion sociale de l’artiste 3On voit indĂ©niablement se prĂ©ciser les statuts de l’artiste et de l’écrivain au xviie siĂšcle, avec une chronologie et des incidences diffĂ©rentes d’un pays Ă  l’autre. Ce mouvement prend naissance dans la Renaissance italienne, deux siĂšcles plus tĂŽt, Ă  travers une institution bientĂŽt officialisĂ©e et protĂ©gĂ©e par les princes, l’acadĂ©mie. La premiĂšre rĂ©union d’humanistes voulant faire revivre les rĂ©unions de Platon et de ses disciples dans les jardins d’AkadĂ©mos est celle initiĂ©e par Marsile Ficin et Pic de la Mirandole Ă  Florence sous le rĂšgne de Laurent le Magnifique. Le mouvement acadĂ©mique va prendre une grande ampleur en Italie au xvie siĂšcle on y compte pas moins de 500 acadĂ©mies vers 1530. Elles se spĂ©cialisent et acquiĂšrent un statut officiel avec devises, rĂ©unions rĂ©guliĂšres, voire enseignement. D’abord nettement philosophiques et littĂ©raires, en opposition Ă  l’enseignement universitaire, des acadĂ©mies de peinture et de sculpture voient le jour, en opposition aux contraintes des corporations, avec le soutien des princes. CĂŽme de MĂ©dicis prĂ©side l’Academia fiorentina créée en 1540 et l’Accademia del disegno créée en 1563. Par un dĂ©cret de 1571, il libĂšre les artistes de son AcadĂ©mie des obligations corporatives. De la mĂȘme maniĂšre, Ă  Rome, la crĂ©ation de l’AcadĂ©mie de Saint-Luc, protĂ©gĂ©e par le cardinal BorromĂ©e, est le signe et le moyen d’une promotion des peintres, puisque, par une abondante production thĂ©orique, elle s’efforce de creuser la distance entre le travail manuel de l’artisan et le travail conceptuel de l’artiste la peinture est d’abord cosa mentale » une production de l’esprit. Comme le poĂšte, l’architecte, le peintre ou le sculpteur affirment que leur art est libĂ©ral » et non mĂ©canique ». Voir le plaidoyer prononcĂ© en 1667 par Nicolas Lamoignon pour le recteur de l’AcadĂ©mie, GĂ©rard Von Opstal qui rĂ©clamait le paiement d’ouvrages pour lesquels, selon le rĂšglement des mĂ©tiers, il y avait prescription N’a-t-on pas sujet Ă  dire que les peintres sont inspirĂ©s par quelque divinitĂ© aussi bien que les poĂštes ? Et que pour donner la vie Ă  des choses inanimĂ©es, il faut ĂȘtre en quelque sorte au-dessus de l’homme ? » La promotion des uns induit une dĂ©valorisation des mĂ©tiers demeurĂ©s au sein des corporations et des querelles infinies entre anciennes et nouvelles institutions. Les acadĂ©mies, qui contrĂŽlent les artistes, leur assurent en Ă©change libertĂ© et supĂ©rioritĂ© par rapport aux autres artisans. Christian Jouhaud a montrĂ© que les auteurs trouvent paradoxalement une autonomie croissante Ă  l’intĂ©rieur d’une dĂ©pendance de plus en plus forte par rapport au pouvoir 1 Dotoli G., LittĂ©rature populaire et groupe dominant. Évasion et contre-Ă©vasion chez Adam Billaut ... 2 La Roque de la LontiĂšre G. A., TraitĂ© de la noblesse, Paris, E. Michalet, 1678, p. 413, citĂ© ibide ... 4Les artistes en viennent donc Ă  occuper ou Ă  ambitionner une place sociale particuliĂšre en raison du lien qu’ils entretiennent avec le pouvoir, mĂȘme si, comme nous le verrons, tous n’appartiennent pas Ă  une structure officielle de type acadĂ©mique et mĂȘme si les artistes de cour constituent une minoritĂ© enviĂ©e. Hommes de lettres et praticiens des arts libĂ©raux sont animĂ©s, certes Ă  des degrĂ©s divers, d’une volontĂ© de distinction sociale. Si la pratique d’un art anoblit, elle pose le problĂšme de la distribution sociale des talents. Un homme du peuple peut-il ĂȘtre poĂšte ? Une origine ignoble ne s’oppose-t-elle pas Ă  la pratique d’un art ? La carriĂšre d’Adam Billaut, poĂšte menuisier, analysĂ©e par Giovanni Dotoli permet au moins de poser la question. Une des plus rares choses du siĂšcle », selon l’abbĂ© de Marolles qui l’a dĂ©couvert, ce fils de paysans pauvres, menuisier Ă  Nevers, a formĂ© sa muse au catĂ©chisme paroissial, Ă  la lecture des livres de colporteurs et des almanachs populaires. En 1636 il rencontre Ă  Nevers l’abbĂ© de Marolles, ancien prĂ©cepteur et bibliothĂ©caire de la duchesse Marie de Gonzague. Cette rencontre est dĂ©cisive en 1638 il est Ă  Paris, il obtient une pension de Richelieu et du chancelier SĂ©guier, qui ne sera cependant jamais versĂ©e. Il se met Ă  l’école des libertins et connaĂźt un succĂšs Ă©phĂ©mĂšre dans la capitale. DĂšs son deuxiĂšme sĂ©jour Ă  Paris 1640, il est en butte aux sarcasmes de ses collĂšgues. ScudĂ©ry, dans l’Approbation du Parnasse qui prĂ©cĂšde son premier recueil, les Chevilles 1644, s’interroge ainsi Quel Dieu t’a rendu son oracle ?/[
] Dois-tu passer dans l’univers/Pour un monstre ou pour un miracle/O prodige entre les esprits/Qui sait tout et n’a rien appris1. » Bien vite, on va trancher pour le monstre plutĂŽt que pour le prodige. Au moment de la naissance de l’artiste par la valorisation de l’étude et du savoir, on rĂ©pugne Ă  admettre dans la sociĂ©tĂ© des poĂštes un artisan, que la pratique et l’appĂ©tit du gain nĂ©cessaire Ă  sa subsistance rend comme esclave, et ne lui inspirent que des sentiments de bassesse et de subjection incompatible avec ceux d’un gentilhomme2 ». L’approbation du Parnasse n’a guĂšre durĂ© ; l’échec de Billaut tĂ©moigne du souci de distinction sociale des littĂ©rateurs parisiens et de leurs protecteurs. Le poĂšte menuisier menace les efforts de promotion des arts, insĂ©parables d’une dĂ©valorisation des mĂ©tiers. G. Dotoli estime que l’Ɠuvre de Billaut confirme que l’opposition entre culture populaire et culture savante est absolument insoutenable ». Au contraire, on pourrait utiliser l’échec du poĂšte menuisier pour montrer une sĂ©paration croissante dans la France du xviie siĂšcle entre culture populaire et culture des Ă©lites, culture de rĂ©fĂ©rence Ă  partir de la formation humaniste, [
] culture Ă©loignĂ©e de tout ce qui est concret, du monde des mĂ©tiers, de tout ce qui est dĂ©sormais jugĂ© vulgaire, sale ou ridicule » Rioux et Sirinelli. 5On voit ainsi se dessiner une conscience sociale, mĂȘme si les artistes entretiennent des liens familiaux forts avec le monde des mĂ©tiers urbains. Le pĂšre de Puget est maçon, celui de Girardon fondeur ; Shakespeare est le fils d’un boucher de Stratford-sur-Avon. On trouve, dans les alliances familiales de Charles Le Brun, beaucoup de peintres et de sculpteurs, mais aussi des Ă©crivains, des tapissiers, des charpentiers et des fondeurs. Le peintre et architecte Inigo Jones, qui domine l’art anglais dans la premiĂšre moitiĂ© du xviie siĂšcle, est fils de tailleur et reçoit une formation de peintre, costumier et dĂ©corateur de théùtre. La solidaritĂ© est renforcĂ©e par des mariages, qui permettent les collaborations entre beaux-pĂšres et gendres et entre beaux-frĂšres ; les fratries sont nombreuses Vouet, Boullogne, Anguier
. Une relative mobilitĂ© permet en France Ă  des fils d’artistes d’embrasser la carriĂšre juridique et des artistes peuvent descendre de petits officiers les Le Nain. Une volontĂ© de distinction s’observe dans les gĂ©nĂ©alogies romancĂ©es que se forgent des familles d’artistes Ă  succĂšs, comme les Mansart, qui prĂ©tendent descendre d’un mythique chevalier romain, chargĂ© par Hugues Capet d’édifier des monastĂšres. Il se lit aussi dans la rĂ©alisation d’autoportraits, individuels ou familiaux, dans lesquels les artistes se reprĂ©sentent en costumes soignĂ©s, avec des attributs du savoir livres, de la sociabilitĂ© Ă©lĂ©gante ou des arts libĂ©raux musique, mathĂ©matique. 6Il faut souligner que la promotion des artistes reste un phĂ©nomĂšne trĂšs limitĂ© en Espagne, oĂč leur position sociale est peu enviable malgrĂ© la rĂ©flexion sur la noblesse des arts et les procĂ©dures engagĂ©es par exemple pour faire reconnaĂźtre Ă  la peinture le statut d’art libĂ©ral, procĂ©dures encouragĂ©es par des hommes de lettres comme Calderon J. Gallego. La plupart des peintres vivent dans une grande pauvretĂ© et une part importante de leurs revenus provient de la dorure et de la mise en couleur des sculptures religieuses, le plus souvent polychromes. Ils ne s’émancipent que difficilement. De cette situation tĂ©moigne par exemple Le Vendeur de tableaux de JosĂ© Antolinez v. 1670, Munich, Alte Pinakothek oĂč l’on voit un homme en guenille, le marchand tratante, visiter l’atelier du peintre, oĂč rĂšgne le plus grand dĂ©nuement et lui acheter une copie d’une Vierge Ă  l’Enfant de Scipion Pulzone. 7Les plus ambitieux des artistes espagnols cherchent donc Ă  Madrid une meilleure reconnaissance. De mĂȘme, l’installation Ă  Paris tĂ©moigne d’une volontĂ© d’ascension vers le statut d’artiste. David Maland a calculĂ©, sur un Ă©chantillon de 200 auteurs pour chaque siĂšcle, que 70 % des littĂ©rateurs français meurent en province au xvie siĂšcle, contre 48 % seulement au xviie siĂšcle. La mobilitĂ© caractĂ©rise dans une large mesure les artistes, qui se dĂ©placent pour suivre la commande, dans les arts plastiques, ou le public, dans les arts de la scĂšne. Quelques centres, caractĂ©risĂ©s par la prĂ©sence de la cour, se renforcent Rome, Paris, et, dans une moindre mesure, Madrid. Si les artistes constituent un milieu solidaire, il n’est pas pour autant fermĂ© ; les Ă©trangers, surtout les Italiens et les Flamands, dominent la scĂšne picturale anglaise, et, pour une bonne partie du siĂšcle, espagnole. La piĂštre considĂ©ration portĂ©e aux peintres nationaux est cause, selon le peintre et historien de l’art Jusepe MartĂ­nez, de l’exil dĂ©finitif d’Antonio Ribera Ă  Naples. Nationaux et Ă©trangers contractent ensemble des mariages. Chez les peintres, les sculpteurs et les architectes, le voyage, en particulier le voyage d’Italie, est un Ă©lĂ©ment essentiel de formation. En Angleterre, la rupture dĂ©cisive avec l’art de la fin du Moyen Âge est le rĂ©sultat du voyage d’Inigo Jones en Italie, en 1615, oĂč il accompagnait le comte d’Arundel. Cinquante ans plus tard, Christopher Wren visite les Provinces Unies, les Pays-Bas et la France. En France, on date traditionnellement du retour de Rome de Simon Vouet, en 1627, la naissance de l’école française. Les peintres espagnols voyagent peu en Italie, en revanche, les Français se retrouvent en nombre Ă  Rome, oĂč ils font quelquefois carriĂšre pendant plusieurs annĂ©es, voire s’y installent dĂ©finitivement Nicolas Poussin, Claude Lorrain. Vers 1600-1620, le mode de vie des peintres qui se retrouvent autour de la Piazza del Popolo, Ă  Rome, prĂ©figure dĂ©jĂ  celui des sociĂ©tĂ©s d’artistes telles qu’on les connaĂźtra jusqu’au Montparnasse des annĂ©es 1920, avec son recrutement international, ses lieux d’échanges les ateliers, les tavernes, sa libertĂ© de recherche artistique et de mƓurs. De la mĂȘme maniĂšre on voit se dĂ©velopper la sociabilitĂ© littĂ©raire autour des cabarets, certains investis par un groupe particulier, comme les libertins qui, Ă  Paris, se retrouvent À la Pomme du Pin, Au Cormier ou encore À la Fosseaux-Lions. Organisation des artistes et diffĂ©rences des carriĂšres 8Le xviie siĂšcle est un moment de thĂ©orisation et de hiĂ©rarchisation des arts et des artistes. La notion fondamentale est celle de genre. Le genre est en art et en littĂ©rature une sĂ©rie homogĂšne d’Ɠuvres rĂ©pondant Ă  des attentes dĂ©terminĂ©es et tendant Ă  se fixer par la reproduction de modĂšles Ă©prouvĂ©s. BĂ©rĂ©nice de Racine ou la Princesse de ClĂšves de Mme de Lafayette ont Ă©tĂ© critiquĂ©s parce qu’ils mĂ©langeaient les genres. Une hiĂ©rarchie trĂšs forte met au premier rang, en vers, l’épopĂ©e et la tragĂ©die, en prose, l’éloquence. Le roman est au bas de l’échelle et ses praticiens cherchent Ă  l’anoblir en lui confĂ©rant des rĂšgles. En peinture, se met en place progressivement une dĂ©finition et une hiĂ©rarchisation des genres, la peinture la plus noble et la plus prestigieuse Ă©tant la peinture d’histoire sacrĂ©e ou profane. Ces rĂ©flexions se dĂ©veloppent au sein des acadĂ©mies. 9Le systĂšme des AcadĂ©mies en France cherche Ă  mettre l’action des artistes au service de l’État. En crĂ©ant un discours cohĂ©rent sur la langue et le goĂ»t, les acadĂ©mies contribuent Ă  crĂ©er une culture commune aux Ă©lites et un consensus autour du pouvoir royal, que tous les arts sont chargĂ©s de cĂ©lĂ©brer. Unissant les artistes dans des institutions contrĂŽlĂ©es par l’État, les AcadĂ©mies engendrent une vĂ©ritable rĂ©volution dans la centralisation et la hiĂ©rarchisation des arts. 10L’AcadĂ©mie française reste le modĂšle de toutes les acadĂ©mies. Créée en 1634 par un groupe de lettrĂ©s, officialisĂ©e par Richelieu, son rĂŽle est d’institutionnaliser la langue commune de la nation. Il s’agit de mettre en place un lissage de la langue, de donner un langage commun. Chaque discours s’achĂšve par l’apologie du monarque. À l’image de l’AcadĂ©mie française, l’AcadĂ©mie royale de peinture et sculpture est créée en 1648. Le principe de sa fondation en est un peu diffĂ©rent, Charles Le Brun et d’autres artistes conçoivent une AcadĂ©mie placĂ©e sous la protection du chancelier SĂ©guier pour que les peintres puissent s’affranchir de la tutelle de la maĂźtrise qui succĂšde aux corporations mĂ©diĂ©vales. Elle fonde son enseignement sur le dessin et le modĂšle vivant, Ă  l’image de l’acadĂ©mie que les Carrache avaient fondĂ©, Ă  la fin du xvie siĂšcle, Ă  Bologne. L’institution rompt avec les pratiques corporatistes, par l’utilisation du dessin et l’approche directe de la nature, et donne un statut libĂ©ral Ă  la peinture qui n’est pas seulement affaire d’imitation. En 1663, Louis XIV restructure l’institution en la hiĂ©rarchisant. Son rĂŽle doctrinal est affirmĂ©. Il nomme Le Brun chancelier permanent. En 1668, l’artiste cumule les fonctions de chancelier et de recteur, enfin, en 1683, il est nommĂ© directeur. On assiste Ă  la mise en place d’expositions prĂ©vues normalement tous les deux ans et accompagnĂ© d’un livret, ancĂȘtre des catalogues. Mais il n’y en aura que dix sous Louis XIV. 11Un rĂŽle de coordinateur » est assurĂ© par la Petite AcadĂ©mie fondĂ©e en 1663. Elle comprend cinq membres reprĂ©sentant des cinq arts. Elle administre l’ensemble de la production intellectuelle et tient lieu de direction gĂ©nĂ©rale de la vie culturelle. Elle est dirigĂ©e par un conseil restreint dĂšs sa crĂ©ation les hommes de lettres Bourzeis, Cassagne, Chapelain et Perrault. C’est l’Ɠil du pouvoir sur la production intellectuelle française. Ce rĂŽle de coordination limite la libertĂ© et l’originalitĂ© dans la crĂ©ation. La petite AcadĂ©mie contrĂŽle tout, elle chapeaute l’ensemble des institutions. La souplesse de sa structure s’oppose Ă  la rigiditĂ© hiĂ©rarchique des autres AcadĂ©mies. Celles-ci, d’ailleurs, ne sont pas seulement des AcadĂ©mies artistiques Ă  l’image de l’AcadĂ©mie d’escrime. La petite AcadĂ©mie n’a pas de rĂšglement avant juillet 1701, aprĂšs cette date, elle devient officiellement l’AcadĂ©mie des inscriptions et des mĂ©dailles. 12À partir de 1661, on assiste Ă  une institutionnalisation de tous les arts sous Louis XIV les maĂźtres Ă  danser, puis les musiciens et les danseurs se fĂ©dĂšrent en AcadĂ©mies, toujours dans le but de lutter contre la maĂźtrise, accusĂ©e de dĂ©cadence des arts. En 1666 est fondĂ©e l’AcadĂ©mie de France Ă  Rome qui accueille les meilleurs jeunes artistes français afin de complĂ©ter leur formation. La mĂȘme annĂ©e voit la crĂ©ation de l’acadĂ©mie des sciences. En 1669, c’est la fondation de l’AcadĂ©mie royale de musique puis, en 1671, celle d’architecture qui scelle la sĂ©paration entre les architectes et les maçons. Il y a mĂȘme eu une tentative de crĂ©ation d’une acadĂ©mie de thĂ©ologie, mais celle-ci est rapidement dissoute en raison des inquiĂ©tudes formulĂ©es par la Sorbonne qui craint de perdre ses privilĂšges. Il en va de mĂȘme pour le théùtre. AprĂšs la mort de MoliĂšre, on ne crĂ©e pas explicitement une acadĂ©mie de théùtre, mais il y a bien un monopole de fait car un seul type de spectacle doit recevoir le label du Roi, comme pour l’opĂ©ra. La volontĂ© de diffusion des grandes Ɠuvres du rĂ©pertoire aboutie, en 1680, Ă  la fondation la ComĂ©die française. 13Le monopole des AcadĂ©mies sur les diffĂ©rents arts traduit le corps du Roi en peinture, en sculpture et en poĂ©sie » ApostolidĂšs. Avec ces institutions, c’est l’ensemble des arts qui se met au service de la gloire monarchique. À partir de 1660, on assiste Ă  une multiplication des AcadĂ©mies en province qui vont rĂ©pandre la mode en vigueur Ă  la cour. L’exemple de celle de Lyon, fondĂ©e en 1667, va servir de modĂšle pour d’autres villes. 14L’Angleterre a Ă©tĂ© tentĂ©e par ce modĂšle, mais l’instabilitĂ© politique qui y rĂšgne ne s’y prĂȘte pas. Les artistes se rassemblent dans des clubs ou des sociĂ©tĂ©s. Une tentative d’organisation des arts se met en place sous Charles II dans la deuxiĂšme moitiĂ© du xviie siĂšcle. Ambitionnant de rivaliser avec Louis XIV, il reprend le modĂšle français de l’AcadĂ©mie et place Ă  sa tĂȘte le peintre italien Antonio Verrio v. 1636-1707. Mais, l’absence d’une autoritĂ© centrale organisĂ©e pour contrĂŽler le travail comme c’est le cas en France avec Colbert et la nature sporadique des mĂ©cĂšnes anglais ont rendu cette volontĂ© difficile, voire impossible. 15En Espagne, la crĂ©ation des acadĂ©mies de Madrid et de Valence est un Ă©chec. Leur volontĂ© de contrĂŽler l’activitĂ© des peintres en favorisant un monopole de la production et du marchĂ© de la peinture se heurte Ă  une opposition trĂšs forte des corporations. Il se dĂ©veloppe alors un dĂ©bat original sur la peinture en tant qu’art libĂ©ral. Le colegio » AcadĂ©mie de Valence tend en effet Ă  favoriser le nĂ©potisme en fixant le prix des examens, empĂȘchant ainsi Ă  tout un groupe de la population de rĂ©aliser et de vendre leurs Ɠuvres. L’institution crĂ©e Ă©galement d’énormes difficultĂ©s aux artistes Ă©trangers voulant s’installer dans la ville et interdit purement et simplement la vente de peintures Ă©trangĂšres qui Ă©taient moins chĂšres que celles fabriquĂ©es Ă  Valence. Tout cela va aboutir Ă  un nombre important de plaintes arguant du statut d’art libĂ©ral de la peinture. Les plaignants infĂ©rant que si la peinture est effectivement un art libĂ©ral, elle doit suivre le modĂšle des autres arts libĂ©raux. Dans une ville comme Valence, on devrait trouver des peintures de diffĂ©rentes qualitĂ©s et Ă  des prix diffĂ©rents ; en fait, un accĂšs Ă  la peinture pour tous. Finalement, en 1617, Philippe II se range du cĂŽtĂ© de la ville contre l’AcadĂ©mie. L’AcadĂ©mie de Madrid, créée en 1603, attend toujours la protection royale en 1619. L’échec est moins clair qu’à Valence, mais lĂ  encore, il semble que l’opposition soit venue de peintres individuels, certainement ceux qui s’opposaient Ă  l’examen pour obtenir la licence. 16En France mĂȘme, oĂč l’hĂ©gĂ©monie du pouvoir royal est quasi complĂšte, l’institutionnalisation des arts ne s’est pourtant pas faite sans heurts. La rĂ©action au mouvement acadĂ©mique va trouver un soutien auprĂšs d’autres corps qui, Ă  ce moment, perdent aussi de leurs privilĂšges, les Parlements. Ainsi le Parlement de Paris va-t-il soutenir les corporations pour tenter d’enrayer l’effritement de son pouvoir et ce, dĂšs la fondation de l’AcadĂ©mie française. Entre 1648 et 1663, la corporation des maĂźtres peintres, soutenue par le Parlement, et l’AcadĂ©mie de peinture, soutenue par Colbert et le pouvoir royal, se heurtent Ă  des oppositions constantes. Ils se livrent une vĂ©ritable guerre d’usure qui voit finalement la dĂ©route de la maĂźtrise. Enfin, les dĂ©bats esthĂ©tiques continuent comme celui entre le dessin et la couleur qui on lieu Ă  Paris, dans la deuxiĂšme moitiĂ© du siĂšcle. 17On peut dire que deux carriĂšres s’offre Ă  l’artiste, celle de la cour et celle de la ville, bien que les plus rĂ©ussies marient les deux. Diego VĂ©lasquez 1599-1660 est l’exemple de l’artiste-courtisan. Il passe plus de trente ans au service de Philippe IV d’Espagne. Le roi l’emploie comme peintre, architecte dĂ©corateur, mais aussi fournisseur d’Ɠuvres d’art et courtisan jusqu’à devenir grand marĂ©chal du palais » en 1652. Plus encore que Charles Le Brun auprĂšs de Louis XIV ou qu’Antonio Verrio auprĂšs des rois d’Angleterre, il est le modĂšle de l’artiste de cour. Il faut distinguer, en Espagne, deux types de peintres rattachĂ©s au palais, les peintres du Roi et le peintre de la Chambre. Si les premiers sont de nombre variable entre quatre et six, il n’y a qu’un seul peintre de la Chambre dont l’occupation principale est de portraiturer le monarque et sa famille. C’est le cas de VĂ©lasquez sous le rĂšgne de Philippe IV, ce sera Juan Carreno de Miranda au temps de Charles II. 18En dehors des capitales, certains foyers sont trĂšs actifs et les artistes y vivent de commandes et de protections rĂ©gionales, publiques ou privĂ©es. À Toulouse se dĂ©veloppe ainsi un foyer original et trĂšs actif autour notamment de la figure de Nicolas Tournier qui, aprĂšs un voyage Ă  Rome, synthĂ©tise les formes caravagesques et les formes locales. Dans la deuxiĂšme moitiĂ© du siĂšcle, l’invention des AcadĂ©mies tend en France Ă  lisser les diffĂ©rences rĂ©gionales. L’exemple du sculpteur, peintre et architecte Pierre Puget, le Michel Ange de la France », semble relativement unique dans l’art français du deuxiĂšme xviie siĂšcle. Il rĂ©ussit Ă  mener une carriĂšre en Italie et en Provence loin de la cour et de l’AcadĂ©mie. Devenu cĂ©lĂšbre, Colbert lui commandes de grands marbres Milon de Crotone, achevĂ© 1682. 19La situation dans les arts du spectacle est assez similaire. Le dramaturge du xviie siĂšcle voit s’ouvrir devant lui deux voies. Celle, traditionnelle, de la protection d’un prince ou d’un grand et celle, nouvelle, d’entrepreneur de spectacles. Avec l’ouverture de théùtres publics et l’organisation de tournĂ©es, l’activitĂ© de l’auteur se commercialise. Il vend sa piĂšce Ă  une compagnie ou, s’il en est actionnaire, il obtient une participation aux bĂ©nĂ©fices. La publication des piĂšces est un autre facteur de commercialisation du mĂ©tier d’auteur, bien que le dĂ©sir d’exclusivitĂ© des troupes fasse quelquefois obstacle Ă  l’impression des piĂšces. Cependant un dramaturge qui rĂ©ussit est celui qui associe les deux carriĂšres, comme Shakespeare, auteur et acteur d’une troupe qui joue aussi bien pour la cour que la ville ou encore Lope de Vega, protĂ©gĂ© du duc d’Albe mais dont les piĂšces sont aussi jouĂ©es dans les théùtres publics corrales. Les tensions entre artistes de la cour et de la ville peuvent ĂȘtre plus aiguĂ«s et s’exercer aux dĂ©pens de la ville. A Paris, la musique en vient Ă  ĂȘtre gĂ©rĂ©e entiĂšrement par la Maison du roi, entraĂźnant une situation trĂšs prĂ©caire pour les musiciens de la ville rĂ©gis par la confrĂ©rie de saint Julien des MĂ©nestriers. Collections et marchĂ© de l’art 20Les Ɠuvres d’art rĂ©pondent Ă  diffĂ©rentes attentes, entre Ă©dification, glorification monarchique et dĂ©lectation. Un trait significatif du xviie siĂšcle europĂ©en est le dĂ©veloppement des collections, dans lesquelles peintures et sculptures, dĂ©tachĂ©es de toute autre fonction, notamment religieuse, acquiĂšrent rĂ©ellement le statut d’Ɠuvres d’art. Le dĂ©veloppement des collections 21La collection princiĂšre existe au xvie siĂšcle, mais elle prend une tout autre ampleur au siĂšcle suivant. Les souverains espagnols, en particulier, hĂ©ritent ce goĂ»t du grand collectionneur que fut Philippe II. Le Prado est le premier palais royal oĂč les peintures sont exposĂ©es en permanence, concurrençant la tapisserie pour la dĂ©coration murale. La dĂ©coration du palais de l’Escorial, dans les annĂ©es 1580, est conçue pour l’exposition de peintures de prestige. En 1700, le roi d’Espagne possĂšde 5 500 tableaux, dont la moitiĂ© acquise par Philippe IV. Les rois de France prĂ©fĂšrent le prestige du bĂątisseur Ă  celui du collectionneur A. Schnapper ; cependant, Louis XIV renoue avec le collectionisme somme toute modeste de François Ier ; entre 1660 et 1693, il forme une des premiĂšres collections d’Europe pour les mĂ©dailles et les pierres gravĂ©es, les pierres prĂ©cieuses, les tableaux, les dessins et les gravures. Assez peu intĂ©ressĂ© personnellement, il laisse Ă  ses ministres le soin de rassembler les trĂ©sors du cabinet du roi. Selon A. Schnapper, les collections ne sont ni nĂ©cessaires ni bien efficaces pour assurer la gloire du roi et l’étendre aux nations Ă©trangĂšres ». Charles Ier est bien d’avantage un amateur d’art. Lors de la vente de ses biens par les rĂ©publicains, ce sont prĂšs de 2 000 peintures, tapisseries, statues et dessins qui sont destinĂ©s Ă  Ă©ponger les dettes du monarque dĂ©funt. Au-delĂ  des princes, les grandes collections se rencontrent chez les personnages qui exercent un rĂŽle important, ou parmi ceux qui sont les plus liĂ©s Ă  la reprĂ©sentation du pouvoir, les ambassadeurs. La collection s’épanouit dans les lieux de pouvoir. Les ministres et les favoris – en France, Richelieu et Mazarin ; en Angleterre, avant la RĂ©volution, Arundel, Buckingham et Hamilton – sont au premier rang des collectionneurs. Sous Philippe IV, le marquis de LeganĂ©s possĂšde 1100 tableaux, le marquis de Carpio, plus de 3 000. 22Progressivement, les collections universelles, du type cabinet de curiositĂ©s, cĂšdent le pas aux collections spĂ©cialisĂ©es. Le xviie siĂšcle voit Ă  la fois l’apogĂ©e et le dĂ©but du dĂ©clin de la Kunst-und Wunderkamern K. Pomian. Apparaissent des collections autonomes de tableaux. Rome a un rĂŽle capital dans le collectionisme, puisque c’est lĂ  avec Venise que s’approvisionne toute l’Europe. C’est lĂ  aussi oĂč se forme le goĂ»t international qui met au premier rang de la valeur la peinture vĂ©nitienne et bolonaise du xvie siĂšcle. En Espagne, en Angleterre ou en France, ce sont toujours Titien et les VĂ©nitiens Tintoret, VĂ©ronĂšse d’une part, les Carrache et leurs suiveurs Guido Reni, l’Albane etc. d’autre part qui dominent les collections prestigieuses. 23Il faut noter que bien souvent les lettres et les arts ont des mĂ©cĂšnes communs. Souvent une belle collection s’accompagne d’une belle bibliothĂšque. Le peintre Eustache Le Sueur et le plus cĂ©lĂšbre luthiste français de l’époque, Denis Gaultier, ont pour mĂ©cĂšne Anne de ChambrĂ©, trĂ©sorier des guerres de Louis XIII et gentilhomme du prince de CondĂ©. ChambrĂ© commande Ă  ces deux artistes un manuscrit de luxe, La RhĂ©torique des dieux, recueil de piĂšces de luth de illustrĂ©. La collection suscite l’Ɠuvre littĂ©raire. Arts et lettres font partie d’une sociabilitĂ© dont le cƓur est l’art de la conversation. Les objets de collection sont, selon le mot de Krzysztof Pomian, des sĂ©miophores ». Au Moyen Âge, les collections de reliques, d’objets sacrĂ©s ou d' Ɠuvres d’art » sont aux mains de l’Église et du pouvoir temporel. Quand une hiĂ©rarchie de richesse se met en place, l’achat de sĂ©miophores, l’achat d’Ɠuvres d’art, la formation de bibliothĂšques ou de collections est une des opĂ©rations qui, transformant l’utilitĂ© en signification, permettent Ă  quelqu’un de haut placĂ© dans la hiĂ©rarchie de la richesse d’occuper une position correspondante dans celle du goĂ»t et du savoir » K. Pomian. Le dĂ©veloppement des collections est ainsi insĂ©parable du dĂ©veloppement d’un marchĂ©. Le dĂ©veloppement du marchĂ© de l’art le marchĂ© de la peinture 24La demande d’images augmente au cours du siĂšcle. On constate un Ă©largissement progressif du public de la peinture, en particulier dans les pays catholiques. L’imagerie dĂ©votionnelle nourrit le mouvement, mais Ă  la marge se diffusent aussi les genres portrait, nature morte, paysage
, en raison des nouveaux usages de la peinture, qui apparaĂźt de plus en plus dans les intĂ©rieurs. Plus tardivement, cet appĂ©tit d’images est lisible aussi en Angleterre en 1705, 80 % des inventaires de l’Orphan’s Court de Londres rĂ©vĂšlent la possession de tableaux, contre 44 % seulement en 1675. Certes, cette prĂ©sence de la peinture est liĂ©e Ă  la richesse mais ces inventaires montrent que les ordinary tradespeople ont autant de tableaux que les professionals et les gentryhouseholders. 25Le mĂ©tier de marchand de tableaux s’autonomise et se professionnalise peu Ă  peu. Les formes les plus structurĂ©es de marchĂ© de l’art se rencontrent Ă  Anvers, qui nourrit toute l’Europe de ses peintures, de tous les genres et de tous les prix. Il faut noter le fort goĂ»t pour la peinture flamande, parallĂšle au goĂ»t dominant vĂ©nĂ©to-bolonais. Anvers vend pour tous les publics et Ă  tous les prix. Mais d’autres lieux prennent de l’importance, oĂč l’on retrouve souvent les marchands du Nord. À Paris, la foire Saint-Germain, une des trois plus importantes de Paris, se spĂ©cialise au dĂ©but du xviie siĂšcle en marchĂ© des objets de luxe soie, bijoux, or mais aussi tableaux. Depuis la deuxiĂšme moitiĂ© du xvie siĂšcle, les marchands d’Anvers ont le monopole du marchĂ© parisien de la peinture. Ils viennent Ă  Paris chaque annĂ©e pour la foire. Vers 1620-1630, ils font face aux efforts protectionnistes de la maĂźtrise des peintres de Paris, qui les obligent Ă  tenir boutique de façon permanente en France, voire de demander la naturalisation, pour continuer leur commerce. Les Français rĂ©ussissent ainsi Ă  endiguer l’influence des marchands d’Anvers. Mais une autre compĂ©tition pour le contrĂŽle du marchĂ© se dĂ©roule alors entre les artistes-marchands et les marchands merciers qui finiront par l’emporter Ă  la fin du siĂšcle on connaĂźt par Watteau la boutique du cĂ©lĂšbre Gersaint. 26Diverses formes de transaction existent mais les ventes publiques aux enchĂšres prennent progressivement de l’importance, notamment en Angleterre ; elles permettent en effet aux comportements agonistiques de se donner libre cours dans un face Ă  face pendant lequel on manifeste simultanĂ©ment son goĂ»t, sa capacitĂ© de sacrifier de la richesse pour le satisfaire et ses possibilitĂ©s financiĂšres » K. Pomian. Les grandes ventes aux enchĂšres publiques deviennent ainsi des Ă©vĂ©nements mondains. À Londres, avant l’introduction des ventes aux enchĂšres d’Ɠuvres d’art, vers 1670, Samuel Pepys achĂšte directement aux artistes ou Ă  des stationers qui vendent aussi des livres. Le marchĂ© du livre est beaucoup plus organisĂ© que celui de l’art, grĂące Ă  la Stationers Company. Il n’y a pas de telle communautĂ© de marchands spĂ©cialisĂ©s dans l’art. Ce sont d’abord les virtuosi, les hommes de lettres londoniens, qui font la popularitĂ© des ventes aux enchĂšres, dont ils se servent comme d’une arĂšne des connaisseurs ». Elles touchent ensuite un public beaucoup plus large, les femmes aussi peuvent y assister. Les commissaires-priseurs ne peuvent pas encore se spĂ©cialiser dans les marchandises artistiques. La plupart vendent Ă  la fois des livres et des Ɠuvres d’art. 27Ces enchĂšres se dĂ©roulent surtout dans des coffeehouses comme Tom’s Coffeehouse ou Barbadoes Coffeehouse. À la mort de Charles II 1685, Londres est ainsi devenue un des marchĂ©s de l’art les plus actifs d’Europe. Au cours des ventes de Covent Garden, entre 1669 et 1692, plus de 35 000 peintures Ă  l’huile s’échangent. On a retrouvĂ©, protagonistes de ces Ă©changes, le nom de 20 nobles, 20 marchands et plus de 100 commoners. J. Brotton insiste sur le rĂŽle de la vente des biens de Charles Ier, qui a mis sur le marchĂ© des centaines d’Ɠuvres. Contrairement Ă  une opinion largement rĂ©pandue, Brotton soutient que cette vente n’est pas le seul fait de rĂ©publicains iconoclastes et ignorants des choses de l’art. Elle a Ă©tĂ© importante pour la formation du goĂ»t anglais puisqu’elle a rendu visibles les trĂ©sors des collections de la Couronne. À l’occasion de cet Ă©vĂ©nement, les tableaux royaux ont Ă©tĂ© transformĂ©s en marchandise, dĂ©truisant pour toujours leur exclusivitĂ© royale, les ĂŽtant au secret du palais royal et les livrant au monde de la vente publique ». 28En Espagne, depuis la fin du xvie siĂšcle, on voit dans les grandes villes des ventes d’art se dĂ©rouler prĂšs du marchĂ©, sur le perron de San Felipe ou Calle Mayor Ă  Madrid, par exemple, ou rue de Santiago Ă  Valladolid. Des lieux ouverts, une absence de toute rĂ©gulation des transactions on est bien loin des panden de Bruges et d’Anvers. Le marchĂ© est nourri par une importation massive des Pays-Bas et l’accroissement du nombre de peintres espagnols travaillant hors du cadre des corporations. Le dĂ©veloppement du marchĂ© entraĂźne l’utilisation rĂ©pĂ©tĂ©e de mĂȘmes modĂšles et une certaine standardisation de la production. Il faut dire que le marchĂ© amĂ©ricain exige une masse considĂ©rable d’images religieuses. Dans la deuxiĂšme moitiĂ© du xviie siĂšcle, pas moins de 24 000 peintures ont quittĂ© SĂ©ville pour l’AmĂ©rique. Des contrats exigent une grande rapiditĂ© de rĂ©alisation. Par exemple, le 26 juillet 1600, le peintre sĂ©villan Miguel VĂĄzquez s’engage Ă  livrer au marchand Gonzalo de Palma 1 000 portraits de figures profanes » de la mĂȘme taille 63 x 42 cm, Ă  raison de 25 par semaine, payĂ©s 4 reales piĂšce. Miguel Falomir observe que les prix de vente sur les foires et dans les stands de rue sont nettement infĂ©rieurs Ă  ceux offerts pour des Ɠuvres commissionnĂ©es. Cela n’empĂȘche pas des peintres cĂ©lĂšbres de participer aux ventes, comme BartolomĂ© Carducho, peintre du roi et marchand de tableaux. 3 Felipe de Guevara, Comentarios de pintura [vers 1560], Madrid, 1788, p. 4-5. 4 Relations, Lettres et discours
, Paris, 1660, Lettre IX, p. 235-23. 29Dans un marchĂ© de l’art naissant, se pose la question de l’attribution du prix. Quand il suggĂšre Ă  Philippe II d’exposer sa collection, Felipe de Guevara avance que les peintures cachĂ©es et tenues hors de la vue sont privĂ©es de leur valeur, qui rĂ©side dans les yeux des autres et leur apprĂ©ciation par des connaisseurs3 ». Traditionnellement, le prix d’une peinture Ă©tait liĂ© Ă  des critĂšres matĂ©riels comme les matĂ©riaux employĂ©s, le nombre, la taille et le costume des personnages. Cependant, depuis la Renaissance, la valeur est de plus en plus attachĂ©e Ă  un savoir, devient affaire de connaisseur rĂ©putation de l’artiste, authenticitĂ©, originalitĂ© de la composition, deviennent des critĂšres importants quand il s’agit des maĂźtres italiens ou nordiques les plus recherchĂ©s. À quoi s’ajoute pour les peintures anciennes la vie sociale » du tableau provenance, possesseur antĂ©rieur, lieu d’accrochage prĂ©cĂ©dent. Entre 1640-1660, les prix des tableaux anciens augmentent considĂ©rablement sur le marchĂ© parisien ; certains s’en Ă©meuvent, considĂ©rant scandaleux l’argent dĂ©pensĂ© en objets de vanitĂ©, comme Samuel SorbiĂšre, protestant rĂ©cemment converti, qui publie une lettre De l’excessive curiositĂ© en belles peintures4 ». Un dĂ©but de spĂ©culation suscite des rĂ©serves morales. Le dĂ©veloppement du marchĂ© de l’art accompagne une Ă©volution des consciences par rapport Ă  l’argent mais permet aussi une Ă©volution du mĂ©tier d’artiste. 30Nicolas Poussin 1594-1665 est l’exemple exceptionnel d’un artiste libĂ©rĂ© de la commande et vivant du marchĂ© de l’art. À partir de 1630, Ă©loignĂ© des grandes commandes publiques, il ne produit plus que des tableaux de chevalet et peut choisir ses clients qui sont des acheteurs, non plus des commanditaires. Le prix de ses tableaux est multipliĂ© par dix au cours du siĂšcle. Il ne dĂ©pend pas d’une cour ou d’un protecteur, il n’a pas d’atelier, pas d’élĂšves. Au-delĂ  des Barberini et de leur rĂ©seau, les principaux acheteurs de Poussin sont français. Ils sont d’origine sociale variĂ©e on trouve parmi eux, le marĂ©chal de CrĂ©qui, le duc de Richelieu ou le roi lui-mĂȘme, qui rĂ©unit une trĂšs importante collection de Poussin ; des secrĂ©taires d’État, comme La VrilliĂšre ou LomĂ©nie de Brienne ; des titulaires d’offices importants comme Chantelou ; des financiers comme Neyret de la Ravoye ; mais aussi des personnages beaucoup plus obscurs, des nĂ©gociants comme Pointel ou Serisier. Il s’agit lĂ  d’une carriĂšre trĂšs particuliĂšre, permise par la naissance d’un vrai marchĂ© de l’art. Les arts, miroir de leur temps » ? La sociĂ©tĂ© est un théùtre, le théùtre, un reflet de la sociĂ©tĂ© ? 31On ne saurait trop souligner l’importance de la mĂ©taphore théùtrale et en gĂ©nĂ©rale de la vision dans les arts et la littĂ©rature du xviie siĂšcle. Avec la perspective linĂ©aire comme mode de reprĂ©sentation picturale depuis la Renaissance, Les images s’inscrivent dĂ©sormais Ă  l’intĂ©rieur d’un cube ouvert d’un cĂŽtĂ©. À l’intĂ©rieur de ce cube reprĂ©sentatif, sorte d’univers en rĂ©duction, rĂšgne les lois de la physique et de l’optique de notre monde » P. Francastel ; d’oĂč l’importance de la mĂ©taphore théùtrale All the world’s a stage », l' illusion comique » le théùtre est un monde en rĂ©duction, le monde n’est qu’un théùtre. Comment le théùtre du xviie reflĂšte-t-il alors la sociĂ©tĂ© ? 32Si l’on tourne le dos Ă  la scĂšne, le lieu théùtral donne, dans la disposition du public, une image particuliĂšre des hiĂ©rarchies. La structure du théùtre public est partout Ă  peu prĂšs la mĂȘme. Le corral madrilĂšne se partage entre le parterre avec ses places debout ou assises et les loges rĂ©servĂ©es aux personnages importants ; un lieu spĂ©cial est rĂ©servĂ© aux femmes du commun et aux ecclĂ©siastiques, ce qui est une particularitĂ© espagnole. Dans le théùtre Ă©lisabĂ©thain, on a, du moins coĂ»teux au plus cher, les places debout Ă  ciel ouvert, les places assises dans les galeries couvertes et enfin les loges. EntiĂšrement couvert, le théùtre de Bourgogne montre une rĂ©partition analogue, avec ses places au parterre Ă  5 sous et ses places en loges Ă  10 sous. 33Si, dans le cas des reprĂ©sentations privĂ©es chez de nobles particuliers les visites » en France, les particulares » en Espagne le public est socialement homogĂšne, il n’en va pas de mĂȘme du théùtre public. La composition des salles est assez semblable Ă  Londres et Ă  Paris. Le parterre, debout, est volontiers remuant, mĂȘme s’il ne faut pas s’exagĂ©rer le caractĂšre populaire de ces spectateurs. Alfred Harbage montre qu’il est constituĂ©, au théùtre du Globe, de boutiquiers, d’artisans et de journaliers. La variĂ©tĂ© de ton et de genres caractĂ©ristique du théùtre de Shakespeare, comme de la tragĂ©die espagnole, de la poĂ©sie savante Ă  la farce, est destinĂ©e Ă  rĂ©pondre Ă  cette diversitĂ© du public. On distingue les connaisseurs des ignorants du parterre, les mosqueteros » en Espagne, les groundlings » en Angleterre. On peut remarquer que la mĂȘme idĂ©e est souvent exprimĂ©e deux fois dans les piĂšces de Shakespeare, sous une forme Ă©laborĂ©e d’abord, plus simple ensuite. Dans la comedia, le gracioso » est chargĂ© de rĂ©pĂ©ter en clair ce qui risquait de paraĂźtre obscur. Cependant, au cours du siĂšcle, on remarque une diminution globale de la composante populaire du public. Les tĂ©moignages contemporains sur le chahut du parterre ne sont pas exempts de prĂ©jugĂ©s sociaux. En France, le public ne change pas radicalement, mais les poĂštes, leurs mĂ©cĂšnes et les amateurs prĂȘchent pour une Ă©puration du goĂ»t comme du public. Il ne faut pas oublier que la dĂ©fense des rĂšgles et, pour le dire d’un mot, du classicisme, est parallĂšle Ă  une exclusion des Ă©lĂ©ments populaires. Le classicisme, rappelle J. Truchet, suppose un consensus culturel, l’existence d’un public auquel il soit naturel et lĂ©gitime de vouloir plaire, les honnĂȘtes gens », la Cour » et la Ville ». L’unitĂ© du classicisme se fonde moins sur des prĂ©ceptes que sur un milieu ». L’exclusion du menu peuple se fait naturellement par l’augmentation du prix des places au cours du siĂšcle. En France comme en Angleterre, la base sociale du théùtre se rĂ©trĂ©cit. 34La nĂ©cessitĂ© de parler Ă  un trĂšs large public oĂč domine, de plus en plus, les catĂ©gories privilĂ©giĂ©es, implique de renvoyer Ă  une morale commune. N’oublions pas que plaire est une nĂ©cessitĂ© vitale pour le dramaturge du xviie siĂšcle. Souvent, on remarque un certain conservatisme dans la vision de la sociĂ©tĂ© vĂ©hiculĂ©e par le théùtre. Celui-ci enregistre certains changements, comme l’importance croissante du commerce et de l’argent, les transformations de la noblesse ou l’appĂ©tit des roturiers enrichis. Le gentilhomme dĂ©sargentĂ© contraint Ă  la mĂ©salliance, le roturier cherchant une promotion Ă  la cour, le bourgeois gentilhomme, sont quelques thĂšmes rĂ©currents de la comedia espagnole, dont l’influence est grande en France et en Angleterre ; mais en gĂ©nĂ©ral, quelque soit l’origine sociale de l’auteur, la morale de la piĂšce demeure attachĂ©e aux valeurs de la noblesse terrienne traditionnelle, dĂ©favorable aux fortunes issues du commerce et de la spĂ©culation. Par exemple, dans les piĂšces de Lope de Vega, le noble enrichi par le nĂ©goce est condamnĂ©, les marchands, petits ou grands, et les armateurs de SĂ©ville peu reprĂ©sentĂ©s ou peu mis en valeur. Le théùtre jacobĂ©en, face aux bouleversements sociaux, tĂ©moigne d’un attachement Ă  l’ordre ancien A. Bry. MoliĂšre montre de maniĂšre trĂšs nĂ©gative ces femmes qui sortent de leur condition, ces prĂ©cieuses qui se prĂ©valent d’un rĂŽle intellectuel dans ce qui deviendra les salons. Le monde comme théùtre est d’abord une mĂ©taphore de la vanitĂ© des biens de ce monde. Il s’agit moins de reprĂ©senter que de moraliser. CalderĂłn de la Barca l’exprime parfaitement dans Le Grand Théùtre du Monde 1645. On y voit le Monde remettre Ă  chaque acteur, du Roi au Mendiant, les insignes de son rang. Les personnages entrent sur scĂšne par le Berceau et en sortent par la Tombe. LĂ , ils doivent remettre leurs attributs et rendre compte de la façon dont ils ont tenu leur rĂŽle. Seuls le Mendiant et la Prudence ont Ă©chappĂ© Ă  l’orgueil et aux intrigues de la cour. Seuls, ils ont compris la leçon de la piĂšce, c’est-Ă -dire de la vie. Seuls, ils ne seront pas damnĂ©s. Quand le rideau tombe, ne demeurent en scĂšne que les quatre derniĂšres choses » la Mort, le Jugement, le Ciel et l’Enfer. 35Si le siĂšcle est fascinĂ© par les pouvoirs de l’illusion, la concorde entre l’ĂȘtre et le paraĂźtre est un souci constant. Les marques de luxe doivent correspondre Ă  un statut social rĂ©el. L’ouvrage de Pierre Le Muet, La ManiĂšre de bĂątir pour toutes sortes de personnes 1623, est un des plus importants de ces recueils, en vogue en France, qui proposent des modĂšles d’habitation selon le rang du propriĂ©taire. L’architecture doit reflĂ©ter la hiĂ©rarchie sociale. On peut dire que Fouquet, par exemple, n’a pas respectĂ© cette rĂšgle, Vaux outrepasse son rang. L’étude du portrait permet de mieux comprendre ce rapport ĂȘtre/paraĂźtre. Elle permet aussi de mieux comprendre sous quelles conditions les catĂ©gories sociales les moins privilĂ©giĂ©es ont droit Ă  ĂȘtre reprĂ©sentĂ©s. Qui a droit Ă  la reprĂ©sentation ? 36Le problĂšme de la dignitĂ© du sujet reprĂ©sentĂ© se pose particuliĂšrement dans le portrait. Ce dernier genre connaĂźt depuis le xvie siĂšcle un grand dĂ©veloppement. Il constitue Ă  la fin du siĂšcle 20 % des images des intĂ©rieurs de Delft, par exemple. Or, Edouard Pommier a relevĂ©, dans la deuxiĂšme moitiĂ© du xvie siĂšcle, un mouvement de remise en cause de ce genre, notamment d’un point de vue social. Alors qu’il cesse d’ĂȘtre rĂ©servĂ© Ă  la reprĂ©sentation des saints et des princes, le portrait suscite la question de la lĂ©gitimitĂ© de la reprĂ©sentation d’un individu. 5 CitĂ© par Pommier Édouard, ThĂ©ories du portrait, Paris, 1998, p. 128. 37Dans une lettre Ă  Leone Leoni, sculpteur et mĂ©dailleur, l’ArĂ©tin le met en garde ainsi Faites donc les portraits de personnages de ce genre [l’érudit Francesco Molza, mort depuis peu], mais ne faites pas les portraits de ceux qui Ă  peine se connaissent eux-mĂȘmes et que personne ne connaĂźt. Le ciseau ne doit pas tracer les traits d’une tĂȘte, avant que la renommĂ©e ne l’ait fait. Il ne faut pas croire que les lois des Anciens aient permis qu’on fasse des mĂ©dailles de personnes qui n’étaient pas dignes. C’est ta honte, ĂŽ siĂšcle, de tolĂ©rer que des tailleurs et des bouchers apparaissent vivants en peinture5. » Cette idĂ©e d’une vulgarisation du portrait se retrouve dans nombre d’écrits du xvie siĂšcle. On ne devrait reprĂ©senter que les exempla virtutis, ou les grands de ce monde, parce que seuls ils ont droit Ă  la mĂ©moire publique. 6 de Piles R., Cours de peinture par principes, Paris, Ă©d. J. Thuillier, 1989, p. 132. 7 Sorel Charles, La Description de l’üle de Portraiture et de la ville des portraits, Paris, 1659, p ... 38De la dignitĂ© du sujet dĂ©pend son traitement, qui oscille entre l’imitare, qui a le sens de donner l’image de quelque chose, avec une certaine libertĂ© et le ritrarre donner une copie littĂ©rale de quelque chose. Pour le thĂ©oricien Roger de Piles, la stricte fidĂ©litĂ© aux traits du modĂšle n’est requise que pour les grands de ce monde Pour les hĂ©ros et pour ceux qui tiennent quelque rang dans le monde, ou qui se font distinguer par leurs dignitĂ©s, par leurs vertus ou par leurs grandes qualitĂ©s, on ne saurait apporter trop d’exactitude dans l’imitation de leur visage, soit que les parties s’y rencontrent belles, ou bien qu’elles y soient dĂ©fectueuses » car ces sortes de portraits sont des marques authentiques qui doivent ĂȘtre consacrĂ©es Ă  la postĂ©ritĂ©, et dans cette vue tout est prĂ©cieux dans les portraits, si tout y est fidĂšle6. » Cette nĂ©cessitĂ© de rendre fidĂšlement le modĂšle vertueux, l’ĂȘtre de haut rang s’explique par les spĂ©culations physiognomoniques, trĂšs en vogue au xviie siĂšcle. En fait, la pratique conduit souvent Ă  l’inverse il faut donner au personnage les traits convenant Ă  sa fonction et Ă  sa dignitĂ©. Il faut que le paraĂźtre corresponde Ă  l’ĂȘtre social, il faut donner Ă  chaque personnage l’attitude, les vĂȘtements, les attributs de sa “qualitĂ©â€, c’est-Ă -dire sa position dans la sociĂ©tĂ© » E. Pommier. DĂ©jĂ  LĂ©onard de Vinci prĂ©conisait que le roi soit barbu, plein de gravitĂ© dans l’air et les vĂȘtements [
]. Les gens de basse condition doivent ĂȘtre mal parĂ©s, en dĂ©sordre et mĂ©prisables [
] avec des gestes vulgaires et tapageurs ». Dans sa Description de l’üle de portraiture 1659 Charles Sorel se moque lui aussi du succĂšs du portrait, de ces modĂšles qui veulent apparaĂźtre dans des vĂȘtements trĂšs magnifiques, et la plupart ne se souci[ant] point s’ils Ă©taient conformes Ă  leur naturel et Ă  leur condition7 ». Analysant le Portrait d’Omer II Talon Washington, National Gallery peint en 1649 par Philippe de Champaigne, Lorenzo Pericolo remarque qu’en tant qu' avocat gĂ©nĂ©ral au parlement de Paris, le modĂšle usurpe » en quelque sorte une posture et un dĂ©cor typique d’un roi ou d’un aristocrate ». 8 Pour reprendre le titre de l’ouvrage de G. Sadoul, Jacques Callot miroir de son temps, Paris, 19 ... 39E. Pommier montre au long de son livre combien il est difficile d’apprĂ©cier le rĂ©alisme » d’un portrait. L’art, comme le langage, est d’abord un systĂšme de signes qui demandent interprĂ©tation. Il faut donc se mĂ©fier de la tentation de voir dans les romans, les gravures ou les peintures un miroir de leur temps8 ». Ils correspondent aux attentes de la clientĂšle. Le cas des portraits de paysans des Le Nain est intĂ©ressant parce que nous voyons des paysans reprĂ©sentĂ©s avec une grande fidĂ©litĂ© apparente des traits, et en mĂȘme temps une grande dignitĂ©. Dans la peinture hollandaise, on trouve souvent des intĂ©rieurs paysans, comme celui peint par Adriaen Van Ostade vers 1635 Munich, Bayerische StaatsgemĂ€ldesammlungen. On y voit des hommes et des femmes boire et fumer. Mais les physionomies sont viles, bouffonnes, tout Ă  fait conformes aux prĂ©ceptes de LĂ©onard. Les acheteurs d’une telle toile ne sont Ă©videmment pas du mĂȘme milieu et peuvent ainsi apprĂ©cier la distance qui les sĂ©pare de ces comportements. Une mise en garde contre les dĂ©bordements des sens n’est pas absente. En effet, dans un milieu modeste, les passions sont censĂ©es s’exprimer plus librement, en tout cas leur reprĂ©sentation ne requiert pas les mĂȘmes contraintes. Adriaen Brouwer, par exemple, illustre les Ă©motions humaines Ă  travers ses portraits populaires. 9 Antoine 1588 ?-1648, Louis 1593 ?-1648 et Mathieu 1607-1677. Ils ont un atelier commun et si ... 10 Champfleury, Essai sur la vie et l’Ɠuvre des Le Nain, Paris, 1850, p. 38. 40A priori rien de tel dans le Repas de paysans 1642, Paris, Louvre ou la Famille de paysans v. 1645-1648, Paris, Louvre des frĂšres Le Nain9. C’est le rĂ©alisme » de la scĂšne qui frappe. Pour Champfleury, qui est Ă  l’origine de la redĂ©couverte de ces peintres, ce sont des historiens » qui apprennent plus sur les mƓurs de leur temps [
] que bien des gros livres10 ». Une critique marxiste s’est emparĂ© de ces peintres populaires », mais il a vite Ă©tĂ© montrĂ© que les trois frĂšres ont fait partie des membres fondateurs de l’AcadĂ©mie et que Mathieu, qui a vĂ©cu plus longtemps, a pu faire une assez belle fortune et a cherchĂ©, aprĂšs l’achat d’une terre prĂšs de Laon, Ă  se faire appeler seigneur de la Jumelle. Fait exceptionnel pour un peintre, il a Ă©tĂ© fait chevalier du Saint-Michel pour ses services dans la milice de Paris, mais il n’a pu faire preuve de sa noblesse. Pourtant, il a Ă©tĂ© vite remarquĂ© que les paysans reprĂ©sentĂ©s Ă©taient bien habillĂ©s, possĂ©daient des verres, etc. Beaucoup d’historiens ont continuĂ© Ă  vouloir y voir des documents transparents, des fenĂȘtres ouvertes sur le monde paysan des environs de Laon au xviie siĂšcle. Ansi, Neil McGregor voit dans les paysans des Le Nain l’illustration d’un dĂ©veloppement historique ». Pour lui, les acheteurs de ces tableaux sont des membres de la bourgeoisie qui achĂštent alors des terres autour de leurs villes natales et les mettent en valeur eux-mĂȘmes ou les confie Ă  un fermier. Ils auraient plaisir Ă  avoir des portraits de leurs paysans, envers lesquels ils seraient animĂ©s d’une bienveillance patriarcale. La dignitĂ© des attitudes et la noblesse des traits des personnages nous Ă©loignent du dĂ©dain et du rire de Van Ostade. Toutefois, il est difficile de croire Ă  un tĂ©moignage naturaliste sur la condition paysanne. Pierre Goubert et JoĂ«l Cornette, aprĂšs d’autres, ont remarquĂ© les Ă©chos eucharistiques du Repas de paysans, qui reprĂ©sente sans doute une visite de charitĂ©, telles qu’elles Ă©taient organisĂ©es vers 1640 par des institutions comme la compagnie du Saint-Sacrement. On peut alors songer Ă  certains bodegones de VĂ©lasquez, mĂȘme s’ils ne procĂšdent pas de la mĂȘme filiation picturale. Ce genre nĂ© Ă  SĂ©ville et Ă  TolĂšde, qui mĂȘle la nature morte et la scĂšne de genre est un des rares genres profanes de la peinture espagnole. On y voit des gens du peuple se livrer Ă  des activitĂ©s trĂšs quotidiennes notamment autour de la prĂ©paration et de la consommation du repas. Pourtant, il n’est pas si profane que cela. La mĂ©ditation religieuse est quelquefois explicite comme dans Le Christ chez Marthe et Marie 1618, Londres, National Gallery, oĂč l’on voit une jeune femme cuisiner, tandis qu’une vieille femme semble lui montrer une image au statut assez compliquĂ© est-ce une scĂšne vue Ă  travers une fenĂȘtre, est-ce un tableau ? reprĂ©sentant la scĂšne Ă©vangĂ©lique qui donne son nom au tableau. L’interprĂ©tation complĂšte est difficile, mais il s’agit sans doute d’une mĂ©ditation sur la vie active et la vie contemplative, Ă  laquelle se joint peut-ĂȘtre la remarque de ThĂ©rĂšse d’Avila, selon laquelle le chemin du Christ passe par les ustensiles de cuisine
 Le portrait d’hommes et de femmes humbles convient particuliĂšrement aux vertus Ă©vangĂ©liques de pauvretĂ© et de simplicitĂ©. 41Cela n’enlĂšve rien au caractĂšre trĂšs convaincant de la reprĂ©sentation, mais le peintre, qui construit savamment ces scĂšnes dans son atelier, ne cherche pas Ă  faire un reportage sur une famille paysanne. Il cherche certainement la vraisemblance, mais ce respect du rĂ©el est empreint d’une religiositĂ© profonde, et conditionnĂ© par la plus ou moins subtile mĂ©ditation qu’il veut offrir Ă  l’amateur. Les stĂ©rĂ©otypes sociaux dans la littĂ©rature espagnole du SiĂšcle d’or 11 FernĂĄndez Alvarez M., La Sociedad española en el Siglo de Oro, Madrid, 1983. 42La littĂ©rature du SiĂšcle d’or espagnol reflĂšte, souvent avec des caractĂšres sombres, toute une sĂ©rie de stĂ©rĂ©otypes sociaux. L’échantillon le plus complet d’un monde oĂč pullulent les dĂ©shĂ©ritĂ©s mendiants et pauvres honteux, soldats en guenilles, Ă©tudiants dissolus, hidalgos de haute lignĂ©e Ă  la maigre fortune, prostituĂ©es
 et dans lequel se distingue la figure du picaro, personnage qui donna lieu Ă  l’un des genres littĂ©raires les plus en vogue dans l’Espagne du xviie siĂšcle11. L’intention satirique des auteurs de ce genre les conduisit Ă  confronter la vie du picaro Ă  celle des puissants maĂźtres qu’ils servaient seigneurs et ecclĂ©siastiques de toutes conditions principalement dont les dĂ©fauts et l’hypocrisie sont mis en relief par ces antihĂ©ros. Le picaro devient ainsi le personnage antagonique du chevalier vertueux et honorable que le roman de chevalerie avait consacrĂ©. Personnage de basse extraction sociale, abandonnĂ© par la fortune, et qui survit dans le monde de la pĂšgre grĂące Ă  son habiletĂ© dans la tromperie et l’escroquerie. Etranger Ă  tout code de conduite honorable, il atteint ses objectifs grĂące Ă  sa ruse mais sans recourir Ă  la violence. Il aspire par-dessus tout Ă  amĂ©liorer sa condition sociale, bien qu’il Ă©choue constamment dans ses tentatives, reflĂ©tant ainsi l’impermĂ©abilitĂ© sociale qui caractĂ©risa l’Espagne du moment. 12 Maravall J. A., La literatura picaresca desde la historia social, Madrid, 1986. 43Bien que la figure du picaro soit dĂ©jĂ  prĂ©sente avec la plupart des traits qui le dĂ©finissent dans le Lazarillo de Tormes 1554, son plus haut niveau littĂ©raire est obtenu par Mateo AlemĂĄn avec son GuzmĂĄn de Alfarache 1599. Au xviie siĂšcle, QuĂ©vĂ©do consacre cette figure satirique dans sa Vida del BuscĂłn llamado don Pablos 1603 ?, et il existe toute une plĂ©iade de romans durant la premiĂšre moitiĂ© du xviie siĂšcle avec une perspective burlesque de mĂȘme nature, dans lesquels on voit dĂ©filer des personnages, masculins et fĂ©minins, qui rĂ©pondent Ă  ces caractĂ©ristiques, comme El GuitĂłn Onofre Gregorio GonzĂĄlez, 1604, La pĂ­cara Justina Francisco LĂłpez de Ubeda, 1605, La Ingeniosa Elena, fille supposĂ©e de La CĂ©lestine Alonso JerĂłnimo de Salas Barbadillo, 1612 et 1614, le Lazarillo del Manzanares Juan CortĂ©s de Tolosa, 1620, Gregorio Guadaña Antonio EnrĂ­quez GĂłmez, 1644 ou Estebanillo GonzĂĄlez Gabriel de Vega, 1646. Quelques autres personnages de romans qui ne cadrent pas complĂštement avec ce genre littĂ©raire partagent Ă©galement nombre de ses caractĂ©ristiques, comme en tĂ©moignent Rinconete y Cortadillo de CervantĂšs 1613, ou El Diablo Cojuelo de LuĂ­s VĂ©lez de Guevara 1641. Si le picaro est un personnage qui s’épanouit principalement en milieu urbain, le chevalier le fait en milieu rural ; c’est ainsi que le reprĂ©sente Alonso JerĂłnimo Salas Barbadillo dans son Caballero perfecto 1620 et dans son antithĂšse El Caballero puntual 161612. 13 Maravall J. A., Teatro y literatura en la Sociedad Barroca, Barcelona, 1990. 44Face au caractĂšre satirique et critique du roman picaresque, le théùtre, d’aprĂšs Maravall, tenta de maintenir en vigueur un systĂšme de pouvoir préétabli et, par consĂ©quent, la stratification et la hiĂ©rarchie des groupes sociaux13. À travers le théùtre de Lope de Vega, CalderĂłn de la Barca, ou de Tirso de Molina, les espagnols assumĂšrent un systĂšme de conventions » qui soutenait un ordre social dans lequel les autoritĂ©s politique et religieuse Roi et Inquisition garantissaient sa validitĂ©. Ainsi, dans une Ă©poque de crise, comme celle que connut l’Espagne au cours du xviie siĂšcle, le théùtre fut l’un des piliers sur lesquels reposa la campagne de renforcement de la sociĂ©tĂ© seigneuriale. Les conflits sociaux seront la thĂ©matique fondamentale des piĂšces de théùtre, le dĂ©sir d’ascension sociale Ă©tant prĂ©sentĂ© de façon rĂ©currente, bien que les personnages vertueux coĂŻncident toujours avec ceux qui acceptent de bonne grĂące leur statut. Le théùtre privilĂ©gia une sĂ©rie de valeurs traditionnelles comme l’honneur, la puretĂ© de sang, la foi, la richesse – spĂ©cialement celle du laboureur – l’amour pur
 en faisant ressortir Ă©galement la diffĂ©renciation bipolaire de la sociĂ©tĂ© entre riches et pauvres, nobles et vilains, seigneurs et serviteurs, oisifs et travailleurs, et parvenant Ă  identifier richesse avec noblesse. L’arbitrisme 14 NDT Le substantif arbitrismo » n’est pas inclus dans le Diccionario de la Real Academia. Seuls ... 15 Vilar J., Literatura y EconomĂ­a. La figura satĂ­rica del arbitrista en el Siglo de Oro, Madrid, 197 ... 45En Espagne, la sociĂ©tĂ© fut Ă©galement l’objet d’une rĂ©flexion par un courant de pensĂ©e que l’on nomme l’arbitrismo » l’arbitrisme14. Est considĂ©rĂ© arbitrista » l’individu qui propose des plans et des projets arbitrios, insensĂ©s ou rĂ©alisables, pour soulager les Finances Publiques ou remĂ©dier Ă  des maux politiques. Le caractĂšre majoritairement pĂ©joratif du terme est issu de son origine littĂ©raire, car c’est dans ce sens que CervantĂšs l’utilise pour la premiĂšre fois dans son Coloquio de los perros 1613. QuĂ©vĂ©do s’exprima Ă©galement avec une fĂ©rocitĂ© particuliĂšre dans son ouvrage La hora de todos o la fortuna con seso 163515. 16 NDT terme employĂ© ici pour dĂ©clin ou dĂ©cadence. 17 GarcĂ­a CĂĄrcel R., Las culturas del Siglo de Oro, Madrid, 1998. 46Dans l’historiographie actuelle, on entend par arbitrismo » ce courant de pensĂ©e politique et Ă©conomique qui, Ă©mergeant au temps de Philippe II, trouve son groupe le plus fourni de reprĂ©sentants dans la Castille des deux premiers tiers du xviie siĂšcle. La majeure partie de ces Ă©rudits se virent encouragĂ©s Ă  adresser leurs arbitrios » solutions aux principales autoritĂ©s, y compris au Roi, par leur profonde conviction de la dĂ©cadence du Royaume, dont la cause, selon eux, rĂ©sidait dans un ou plusieurs problĂšmes sociaux, Ă©conomiques et financiers qui caractĂ©risĂšrent l’Espagne du SiĂšcle d’or. Parmi ceux-ci on distingue l’augmentation des prix fruit de l’abondance d’or et d’argent en provenance d’AmĂ©rique, la diminution corrĂ©lative de la compĂ©titivitĂ© des produits espagnols et l’introduction correspondante de marchandises Ă©trangĂšres qui provoquaient la ruine de l’industrie nationale, la dĂ©cadence du commerce et l’abandon de l’agriculture et de l’élevage. Les arbitristas » dĂ©noncĂšrent Ă©galement l’appauvrissement progressif de l’État, dont la dĂ©pense publique croissante dĂ©coulant de l’entretien d’une armĂ©e plĂ©thorique, dispersĂ©e sur un vaste territoire Ă©tait compensĂ©e par l’augmentation des impĂŽts, gangrĂšne financiĂšre dont le reflet n’est autre que la ruine de la nation et le dĂ©peuplement. Tout cela, d’aprĂšs de nombreux arbitristas », provoquait l’abandon des activitĂ©s de production et d’investissement de la part des Espagnols, tandis que les Ă©trangers devenaient les maĂźtres des ressorts Ă©conomiques du pays. De la mĂȘme façon, ils imputaient Ă  l’excessive circulation monĂ©taire le goĂ»t du luxe et de l’oisivetĂ© dans les classes possĂ©dantes, et la nĂ©gligence qui s’ensuivait pour les activitĂ©s productives. La consĂ©quence de tout cela fut la declinaciĂłn16 » de la Nation, terme qui rĂ©sumait parfaitement leur impression de vivre un moment de crise Ă©conomique et sociale17. 47Bien que les termes arbitrio » et arbitrista » aient Ă©tĂ© employĂ©s dans la littĂ©rature du SiĂšcle d’or dans un sens clairement pĂ©joratif, les avis de ces individus Ă©tant jugĂ©s insensĂ©s, il est certain que parmi ceux qui Ă©mirent leur opinion, il y eut de nombreux personnages lucides, intelligents et des professionnels de toutes sortes d’activitĂ©s, qui surent observer avec acuitĂ© les problĂšmes Ă©conomiques et sociaux de l’Espagne d’alors et prĂ©voir des solutions. Parmi les plus importantes figures de cette Ă©cole de pensĂ©e il y eut le comptable du TrĂ©sor Luis Ortiz, auteur du Memorial al Rey para que no salgan dineros de España 1558 ; l’avocat de la Chancellerie Royale de Valladolid, MartĂ­n GonzĂĄlez de Cellorigo, continuateur de ce que l’on appela l’Ecole de Salamanque » et auteur du Memorial de la polĂ­tica necesaria y Ăștil restauraciĂłn a la repĂșblica de España 1600 ; le mĂ©decin CristĂłbal PĂ©rez de Herrera, rĂ©dacteur d’un mĂ©moire dans lequel Ă©taient abordĂ©es
 de nombreuses choses touchant au bien, Ă  la propriĂ©tĂ©, Ă  la richesse, Ă  la futilitĂ© de ce royaume et au rĂ©tablissement des gens » 1610 ; le professeur en Écritures SacrĂ©es, Sancho de Moncada, dont les Discursos 1619 seraient rééditĂ©s en 1746 sous le titre RestauraciĂłn polĂ­tica de España ; le chanoine et consultant du Saint-Office, Pedro FernĂĄndez de Navarrete, qui Ă©crivit le livre intitulĂ© ConservaciĂłn de MonarquĂ­as 1626 ; Miguel Caxa de Leruela, du Conseil de Castille et Visiteur GĂ©nĂ©ral du Royaume de Naples, dont l’Ɠuvre la plus connue s’intitulait RestauraciĂłn de la abundancia de España 1631 ; ou le procurateur des galĂ©riens Francisco MartĂ­nez de Mata, auteur de cĂ©lĂšbres Memoriales et Discursos 1650-1660.

4 La puissance publique n’est pas lĂ©gitime pour agir sur nos modes de vie. Selon cet argument, la puissance publique sortirait de son rĂŽle en cherchant Ă  transformer nos modes de vie pour la transition. Cela irait Ă  l’encontre de l’idĂ©e d’un individu libre et responsable. Dans un contexte Ă©conomique mondialisĂ©, marquĂ© par des Voici la rĂ©ponse Ă  la question de CodyCross - Aussi appelĂ©e Ă©toile filante. Si vous avez besoin d'aide ou avez des questions, laissez votre commentaire ci-dessous. Home Saisons Groupe 76 Phase 4 RĂ©pondre Mode de vie des artistes en marge de la sociĂ©tĂ© Mode de vie des artistes en marge de la sociĂ©tĂ© RĂ©pondre BohĂšme CodyCross CodyCross est un jeu rĂ©cemment sorti dĂ©veloppĂ© par Fanatee. C’est un jeu de mots croisĂ©s qui contient de nombreux mots amusants, sĂ©parĂ©s en diffĂ©rents mondes et groupes. Chaque monde a plus de 20 groupes avec 5 puzzles chacun. Certains des mondes sont la planĂšte Terre, sous la mer, les inventions, les saisons, le cirque, les transports et les arts culinaires.
CodyCross RĂ©ponse » Saisons Groupe 76 » Grille 4 » Mode de vie des artistes en marge de la sociĂ©tĂ© Le jeu simple et addictif CodyCross est le genre de jeu oĂč tout le monde a tĂŽt ou tard besoin d’aide supplĂ©mentaire, car lorsque vous passez des niveaux simples, de nouveaux deviennent de plus en plus difficiles.
français arabe allemand anglais espagnol français hĂ©breu italien japonais nĂ©erlandais polonais portugais roumain russe suĂ©dois turc ukrainien chinois anglais Synonymes arabe allemand anglais espagnol français hĂ©breu italien japonais nĂ©erlandais polonais portugais roumain russe suĂ©dois turc ukrainien chinois ukrainien Ces exemples peuvent contenir des mots vulgaires liĂ©s Ă  votre recherche Ces exemples peuvent contenir des mots familiers liĂ©s Ă  votre recherche margins of society fringes of society edge of societyfringe of society margin of society periphery of society outskirts of society marginalised in society isolated from society alienated from society Suggestions Cette rĂ©duction a influencĂ© en particulier les segments de la population vivant Ă  la marge de la sociĂ©tĂ©. This reduction influenced in particular the segments of the population living on the margins of society. Avec un bĂ©bĂ© sur les bras, nous avons vĂ©cu Ă  la marge de la sociĂ©tĂ© jusqu'Ă  l'annĂ©e 1980. Les nĂ©onazis descendent fiĂšrement dans la rue, sĂ»rs de leur impunitĂ©, se prĂ©sentent Ă  des postes politiques et passent peu Ă  peu de la marge de la sociĂ©tĂ© au statut de courant dominant - avec des consĂ©quences mortelles pour les minoritĂ©s. Neo-Nazis are proudly and boldly taking to the streets, running for political office, and gradually being elevated from the fringes of society to the mainstream - and it is having deadly consequences for minority communities. Des personnages excentriques vivant Ă  la marge de la sociĂ©tĂ©, dans une ignorance bĂ©ate ou dans une dĂ©viance diabolique. Eccentric figures walking on the edge of society, either in blissful ignorance or devilish deviance. Mais toujours dit Mungo de la marge de la sociĂ©tĂ©, de la position des exclus, marginalisĂ©s. But always Mungo told from the edge of society, from the position of the excluded, marginalized. Coal to diamonds est mon histoire - grandir en sentant que vous ĂȘtes dans la marge de la sociĂ©tĂ© et en vous battant pour trouver votre place. Coal to Diamonds is my story - growing up feeling like you are on the margins of society and struggling to find your place. Le ton volontiers lĂ©ger et confiant des organisateurs sera une façon d'accĂ©der Ă  tous ceux qui se pensent comme Ă©tant Ă  la marge de la sociĂ©tĂ©. The deliberately light-hearted and confident tone of the event will be a way to reach out to those who think of themselves as being on the margins of society. L'Ă©crivain George Orwell a vĂ©cu dans les rues de Londres pour dĂ©couvrir la vie des personnes qui vivent Ă  la marge de la sociĂ©tĂ©. The writer, George Orwell, lived on the streets of London to discover what it was like for those on the margins of society. Par consĂ©quent, ils dĂ©rivent souvent vers la marge de la sociĂ©tĂ© oĂč ils mĂšnent une vie dans l'anonymat. Because of this, they often drift to the margins of society where they live an anonymous life. L'urbanisation et l'industrialisation croissantes ont relĂ©guĂ© ces personnes Ă  la marge de la sociĂ©tĂ© oĂč ils sont devenus des assistĂ©s sociaux, et des sĂ©dentaires contraints d'accepter des emplois imposĂ©s et de scolariser leurs enfants. Increasing urbanization and industrialization had pushed those people to the margins of society, where they had become dependent on social assistance and were forced, in their sedentary situation, to accept work and to send their children to school. Le vĂ©lo, c'Ă©tait un mode de dĂ©placement pour les pauvres ou pour les Ă©colos un peu fous, les personnes qui l'utilisaient avaient vraiment besoin de sentir qu'ils n'Ă©taient pas Ă  la marge de la sociĂ©tĂ© et de lĂ©gitimer cet usage. Cycling was a mode of transport for the poor or slightly mad eco-warriors. Cyclists, however, had a real need to feel they weren't on the margins of society and to legitimise their use of bikes. En matiĂšre d'emploi, nous devons aboutir Ă  la pleine Ă©galitĂ© des chances, combattre l'exclusion sociale, soutenir ceux qui sont Ă  la traĂźne, ceux qui vivent dans des situations dĂ©favorisĂ©es et ceux qui ont Ă©tĂ© repoussĂ©s Ă  la marge de la sociĂ©tĂ©. In employment, we must achieve full equality of opportunities, combat social exclusion, support those who lag behind, those in disadvantaged situations and those who have been forced onto the edges of society. Pour les personnes handicapĂ©es, trouver un emploi est particuliĂšrement difficile et la stigmatisation dont elles sont parfois victimes a pour effet de les relĂ©guer Ă  la marge de la sociĂ©tĂ©. Employment is particularly difficult for persons with disabilities, and the stigma sometimes associated with disabilities results in their relegation to the margins of society. Avec les silhouettes de passants dĂ©sormais Ă  peine esquissĂ©es, c'Ă©tait un peu comme s'il voulait conjurer ses premiĂšres annĂ©es de photographe consacrĂ©es Ă  nous montrer, au plus prĂšs et bien de face, des gens vivant Ă  la marge de la sociĂ©tĂ©. With their barely sketched silhouettes of passers-by, it was a little as if he were trying to move away from his first years as a photographer, which had been dedicated to showing us, up-close and in-our-face, people living on the margins of society. En gĂ©nĂ©ral ce sont des enfants de rues ou encore des Nawars [peuple nomade vivant Ă  la marge de la sociĂ©tĂ© en Syrie, au Liban et en Jordanie.] In general, they are street children or even Nawads [a term for nomadic people who live at the edges of society in Syria, Lebanon, and Jordan.] Ils adoptent des comportements qui les placent Ă  la marge de la sociĂ©tĂ©. Les deux ont Ă©voluĂ© du marge de la sociĂ©tĂ©. 20 je ne sais pas quel terme pourrais-je utiliser, mais qu'ils se trouvaient 21 au marge de la sociĂ©tĂ©. 23 know what term to use, but quite simply they were pushed to the margins. La vie quotidienne des BrĂ©siliens Ă  la marge de la sociĂ©tĂ© devient une mise en scĂšne photographique rĂ©ussie grĂące aux qualitĂ©s esthĂ©tiques de l'artiste. The everyday life of marginal Brazilian society is put in a photographic scene with the attention to detail and esthetics of the artist. La dĂ©claration Ă©tablit un parallĂšle entre la persĂ©cution passĂ©e de non-conformistes anabaptistes et les groupes mis Ă  la marge de la sociĂ©tĂ© actuelle. The statement draws parallels between past persecution of Anabaptist nonconformists and marginalized groups on the fringes of today's society. Aucun rĂ©sultat pour cette recherche. RĂ©sultats 32. Exacts 32. Temps Ă©coulĂ© 336 ms. 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Traductionsen contexte de "des gens vivant en marge de la société" en français-anglais avec Reverso Context : Lieu stratégique lors des guerres civiles, il est maintenant emprunté principalement par des gens vivant en marge de la société.
Depuis toujours l'artiste dispose d'un statut particulier. Pas de privilĂšge mais une existence sociale lui confĂ©rant une place Ă  part...L'Art est le fruit d'une inspiration et d'un savoir-faire, produit d'une source impalpable, immatĂ©rielle et qui se veut indĂ©pendante. Cette individualitĂ© tire son existence d'une prĂ©disposition crĂ©atrice naturelle Ă©chappant Ă  tout contrĂŽle institutionnel. L'artiste est un individu qui, par dĂ©finition, peut se passer de la sociĂ©tĂ© pour maĂźtriser son sujet. Il impose aux yeux du public sa force crĂ©atrice et l'image qu'il veut transmettre et mĂȘme si son oeuvre trouve son inspiration dans l'environnement dans lequel elle est pensĂ©e et conçue, elle n'en demeure pas moins le fruit d'un concept individuel, voire Ă©goĂŻste lorsqu'elle provoque. Cette volontĂ© farouche qu'ont les artistes Ă  ne vouloir exister que par eux-mĂȘmes est en opposition avec ce que la sociĂ©tĂ© tente d'imposer aux dĂ©pendance au systĂšme facilite la gestion des imposant un rythme et un cap Ă  tous les individus, les pouvoirs politiques prennent en main les destinĂ©es, s'arrogeant ainsi les prĂ©rogatives qui servent surtout leurs intĂ©rĂȘts. Le peuple n'est prĂ©tendument important qu'en pĂ©riode Ă©lectorale. Les promesses ne sont jamais de l'aspect matĂ©riel qui, en rĂšgle gĂ©nĂ©rale, n'est pas sa prioritĂ©, l'artiste se trouve totalement dĂ©tachĂ© physiquement et parfois mĂȘme psychologiquement de la force crĂ©atrice devient un moteur, Ă©chappant Ă  tous contrĂŽles institutionnels et la popularitĂ© en est l'apothĂ©ose. Ce besoin vital de libertĂ© est profondĂ©ment inscrit dans les gĂšnes de l'artiste pour ce dernier, seule l'oeuvre a de l'importance. Nous connaissons les destins particuliers et souvent violents de nombreux crĂ©ateurs passĂ©s Ă  la postĂ©ritĂ©. A cet Ă©gard,jamais la sociĂ©tĂ© ne les a Ă©pargnĂ©s de leur vivant, les portant aux nues quelques annĂ©es aprĂšs leur mort. Ces destins souvent cruels mettent en exergue l'ambiguĂŻtĂ© de l'existence intermittents du spectacle sont probablement le reflet de notre Ă©poque et de ce qui se fait de pire en matiĂšre de dĂ©pendance castratrice. Victimes du nombre... manque d'autonomie existentielle... recherche d'une sĂ©curitĂ© matĂ©rielle en contradiction avec la vĂ©ritable Ăąme artistique... Non, certainement pas. De tous temps, l'art a fait des victimes. La sociĂ©tĂ© est impitoyable envers ceux qui ne rentrent pas dans le rang. L'artiste a l'obligation de rĂ©ussir par lui-mĂȘme si il veut survivre en prĂ©servant la puretĂ© de sa force magnifique "mission" que de provoquer l'Ă©motion. La sociĂ©tĂ© ne peut se passer des artistes ; ces gens bizarres qui font pousser des fleurs sur le bĂ©ton et habillent de couleurs vives la tristesse de notre quotidien. © TOUS DROITS RÉSERVÉS
DiplĂŽmefavorisant l’inscription professionnelle dans des Ă©quipes concernĂ©es par les relations de soins et leurs enjeux interpersonnels, en particulier dans les domaines de la maladie chronique, du handicap, des soins palliatifs, de la fin de vie, des Ăąges extrĂȘmes, et au-delĂ  dans toutes les activitĂ©s de rĂ©flexion et de recherche dans les sciences de la vie.
Accueil Revues Espaces et sociĂ©tĂ©s NumĂ©ro 2017/4 n° 171 Zone l’espace d’une vie... Éditorial Zone l’espace d’une vie en marge Suivre cet auteur JĂ©rĂŽme Beauchez, Suivre cet auteur Florence Bouillon, Suivre cet auteur Djemila Zeneidi Dans Espaces et sociĂ©tĂ©s 2017/4 n° 171, pages 7 Ă  18 Suivant ArticlePlanBibliographieAuteursCitĂ© parfile_downloadTĂ©lĂ©charger Article MĂȘme si on dort dans la rue, on n’est pas des loques. On est des chĂŽmeurs, des zonards, des mancheurs, mais on n’est pas des clochards. » Propos anonymes, recueillis dans la rue par Lionelle Reynes 1985, p. 38 1 Alors que le quotidien des jeunes de banlieue » ou des bandes ethniques » focalise depuis plusieurs dĂ©cennies l’attention des sociologues, l’autre visage des jeunesses relĂ©guĂ©es que prĂ©sentent les zonards » reste quant Ă  lui quasi invisible du point de vue des sciences sociales europĂ©ennes. Rares sont en effet les Ă©tudes de ces nomades du vide » Chobeaux, 2004 que seraient ces jeunes de la rue, que l’on dit aussi en errance » Laberge et Roy, 1996 ; Pattegay, 2001 ; Parazelli, 2002. Population sans domicile aux allures bigarrĂ©es, souvent accompagnĂ©e de ses chiens, ils apparaissent surtout dans le rĂŽle du mancheur rĂ©clamant la piĂšce sur le pavĂ© des centres-ville ou au seuil des supermarchĂ©s. À la fois terme vernaculaire et concept proche de l’expĂ©rience, le mot zonard est celui que la plupart choisissent pour se dĂ©signer Pimor, 2014. La zone Ă©voque alors un mode de vie supposant de tracer sa route dans les marges de la sociĂ©tĂ© de consommation Angeras, 2012, d’oĂč les appellations de traceurs ou de routards Ă©galement employĂ©es par certains. 2 L’étymologie du terme renvoie Ă  la zone non aedificandi non constructible qui s’étendait au-delĂ  des fortifications de Paris. AprĂšs la guerre de 1870, la destination exclusivement militaire de cet espace a Ă©tĂ© peu Ă  peu abandonnĂ©e pour cĂ©der la place Ă  l’installation de baraquements, de roulottes et de taudis qui ont regroupĂ© les travailleurs pauvres, les chiffonniers, les vagabonds, les mendiants et autres reprĂ©sentants des classes dangereuses » dont Louis Chevalier a rĂ©alisĂ© une cĂ©lĂšbre historiographie Chevalier, 2002. Aux marges de Paris, les zoniers » incarnent alors la figure du paria urbain qui inquiĂšte ou menace la sociĂ©tĂ© bourgeoise. PhotographiĂ©s par EugĂšne Atget [1] 1913 et filmĂ©s par Georges Lacombe 1928, ils apparaissent comme mis au ban d’une sociĂ©tĂ© industrielle qui les a frappĂ©s d’infamie. 3 Les zonards d’aujourd’hui composent une nouvelle strate de l’archĂ©ologie des marges urbaines. RĂ©cente, elle trouve ses racines syncrĂ©tiques loin des anciennes fortifications de Paris, dans l’entremĂȘlement des subcultures punk et traveller nĂ©es outre-Manche au cours des dĂ©cennies 1970 et 1980. Tandis que la zone d’hier correspondait Ă  un territoire bien dĂ©limitĂ©, celle d’aujourd’hui se matĂ©rialise dans les dĂ©placements de groupes qui Ă©voluent principalement dans les intervalles des villes. Si les zonards contemporains ne sauraient par consĂ©quent ĂȘtre vus comme leurs descendants directs, ils partagent nĂ©anmoins avec les zoniers d’autrefois certaines propriĂ©tĂ©s de situation dans l’espace social. Les uns comme les autres restent en effet confinĂ©s Ă  des espaces caractĂ©risĂ©s par la relĂ©gation, Ă  des situations Ă©rigĂ©es en problĂšme social. Ainsi la prĂ©sence et la visibilitĂ© des zonards – particuliĂšrement remarquĂ©es depuis le tournant des annĂ©es 2000 Ă  l’occasion des festivals dĂ©diĂ©s Ă  la musique ou aux arts de rue – sont-elles le plus souvent envisagĂ©es comme relevant d’une problĂ©matique d’encadrement d’une fraction de la jeunesse considĂ©rĂ©e comme dĂ©viante. Ils font l’objet d’une culture du contrĂŽle » Garland, 2001 qui oscille entre mesures de bannissement prises par certaines mairies et tentatives de rĂ©gulation d’une prĂ©sence dont il s’agit de maĂźtriser les potentiels effets pathogĂšnes. Les questions du sans-abrisme et de l’insĂ©curitĂ© ont dĂšs lors Ă©tĂ© posĂ©es, aux cĂŽtĂ©s des problĂšmes de santĂ© publique liĂ©s aux consommations d’alcool et de produits stupĂ©fiants Chobeaux, 2004, p. 41-42 ; Hurtubise et Vat Laaroussi, 2002 ; Van Hout, 2011. 4 Ainsi la vie et le quotidien des zonards apparaissent-ils essentiellement en nĂ©gatif de ce qu’en disent les pouvoirs publics ou les instances de rĂ©gulation sanitaire et sociale Langlois, 2014. Un nĂ©gatif qui, Ă  la maniĂšre d’une image photographique oĂč les contrastes apparaissent comme inversĂ©s, ne donne Ă  voir qu’un reflet d’une rĂ©alitĂ© dont ressortent les dĂ©fauts, comme les manques. Ce numĂ©ro d’Espaces et SociĂ©tĂ©s a pour objet de proposer une autre prise de vue. Celle-ci ouvre sur une double perspective la premiĂšre cible les modalitĂ©s d’intervention, ou de non-intervention, de la puissance publique vis-à‑vis des habitants et des acteurs de la zone. Hier comme aujourd’hui, comment les institutions font-elles face Ă  des populations qui, de maniĂšre subie ou choisie, se situent Ă  la marge des centralitĂ©s urbaines comme des normes sociales communĂ©ment partagĂ©es ? Quels sont les marges de manƓuvre accordĂ©es, les modalitĂ©s de rĂ©pression, les terrains d’entente Ă©ventuels, et comment se traduisent-ils du point de vue de la gestion de ces indĂ©sirables » ? La seconde focale a pour objet de restituer de l’intĂ©rieur les systĂšmes de valeurs qui orientent les actions des zonards. Du point de vue de ses acteurs, que dĂ©signe au juste ce signifiant dont la plasticitĂ© renvoie aux idĂ©es d’un espace indissociablement physique et symbolique ? Autrement dit, qu’il relĂšve de l’auto-attribution ou du stigmate, Ă  quoi correspond exactement le label zonard dans les mondes de la marge et leurs territoires ? Quels en sont les codes et de quelles façons se transmettent-ils ? 5 Pour rĂ©pondre Ă  cette double interrogation, ce dossier se dĂ©cline en trois thĂ©matiques. Les deux premiers articles traitent de la zone parisienne dans une perspective sociohistorique. Les trois articles suivants proposent une description dense » Geertz, 2003 des modes de vie zonards aujourd’hui, en France, en Allemagne et en Grande-Bretagne. Ces modes de vie valorisent une forme d’entre-soi tentĂ© par le dĂ©tachement vis-à‑vis de la sociĂ©tĂ© instituĂ©e. Enfin, parce que la zone ne constitue jamais un espace totalement Ă  part, l’ensemble se clĂŽt par une analyse du recours aux dispositifs de l’infra-assistance, incluant la maniĂšre dont ce recours s’inscrit dans la construction d’une identitĂ© zonarde revendiquĂ©e. 6 En finalitĂ©, l’objet de ce dossier rĂ©side dans les diffĂ©rentes façons de produire ces formes mouvantes de marginalitĂ©, dont les frontiĂšres indĂ©cises fluctuent entre conceptions Ă©miques la perspective des zonards et visions Ă©tiques celles de la sociĂ©tĂ© instituĂ©e et des pouvoirs publics. PlutĂŽt que de rĂ©duire le flou dont la notion de zone est empreinte, nous avons donc considĂ©rĂ© son caractĂšre labile comme le principal levier d’une approche qui articule espace et histoire ou diachronie et synchronie des usages et des modes de gestion d’une territorialitĂ© marginale. Une sociohistoire de la zone, espace de relĂ©gation7 La premiĂšre partie de notre dossier dĂ©taille le passage de la figure du zonier Ă  celle du zonard, et donc la progressive modification des territoires de la zone. Cette enquĂȘte est ouverte par Anne Granier, laquelle concentre ses efforts sur la pĂ©riode de l’entre-deux-guerres et la microhistoire d’un segment de la zone parisienne situĂ© Ă  Boulogne-sur-Seine. L’auteure s’est consacrĂ©e Ă  retracer la gĂ©nĂ©alogie du peuplement comme des conflits qui ont animĂ© cet espace, marquĂ© par l’la intolĂ©rance des pouvoirs publics Ă  l’égard de ses occupants. En effet, si les pouvoir publics tolĂ©raient l’existence de la zone faute de mieux, par nĂ©cessitĂ© de loger les plus pauvres d’entre les ouvriers qui ne pouvaient s’acquitter des loyers de Paris intra-muros, ils n’avaient pourtant de cesse de vouloir Ă©liminer le problĂšme social qu’ils constituaient Ă  leurs yeux. La tolĂ©rance cĂ©dait alors le pas Ă  l’intolĂ©rance pour des zoniers constamment en porte-Ă -faux vis-à‑vis de la loi. Or, les gens sans aveu » n’ont pas tĂ©moignĂ© seuls subsistent les propos tenus par ceux – dĂ©cideurs politiques, reprĂ©sentants de la loi et, plus rarement, petits propriĂ©taires zoniers – qui Ă©taient en charge de l’administration quotidienne de cette enclave partagĂ©e entre Paris et banlieue, de mĂȘme qu’entre reconnaissance partielle et marginalitĂ©. C’est donc le quotidien de ce territoire ambivalent qu’Anne Granier s’est efforcĂ©e d’exhumer des archives, territoire qui fait moins l’objet d’une rĂ©pression que d’un abandon surveillĂ© oĂč, tout au long des annĂ©es 1920 et 1930, les pauvres sont restĂ©s dans la visĂ©e des pouvoirs publics qui les ont encadrĂ©s mollement, les abandonnant le plus souvent Ă  leur sort, dans l’attente de trouver une hypothĂ©tique solution Ă  leur indigence. 8 Élargissant la focale historique portĂ©e sur la zone de Paris, James Cannon interroge pour sa part la dĂ©clinaison historique des labels de dangerositĂ© et d’infamie que la zone a charriĂ©s tout au long du xxe siĂšcle. De la Belle Époque aux annĂ©es 1970, en passant par l’entre-deux-guerres, l’auteur puise dans diverses sources, dont celles de la littĂ©rature et de la chanson populaire, pour montrer comment les gĂ©nĂ©rations successives de zoniers et de zonards ont incarnĂ© diffĂ©rentes versions des classes dangereuses » Ă©voluant aux marges de Paris. Tour Ă  tour perçus comme des rĂ©volutionnaires en puissance, des agents de l’étranger et des hommes dĂ©pravĂ©s voire les trois Ă  la fois, les zoniers ont constituĂ© une figure marginale et le plus souvent criminalisĂ©e ; cette criminalisation a suivi diverses inspirations, selon les analystes et leurs sensibilitĂ©s idĂ©ologiques ou religieuses. C’est ainsi que la zone et ses habitants apparaissent comme d’efficaces rĂ©vĂ©lateurs de la maniĂšre dont la sociĂ©tĂ© française a construit ses figures de l’altĂ©ritĂ© tout au long du premier xxe siĂšcle. Mais quid des Trente Glorieuses au cours desquelles la zone est effacĂ©e par les travaux du pĂ©riphĂ©rique urbain, disparaissant ainsi en tant qu’espace annulaire qui constituait une ceinture de misĂšre autour de Paris ? Avec l’émergence de la figure moderne du zonard au dĂ©tour de la dĂ©cennie 1970, James Cannon montre que la zone dĂ©mantelĂ©e en tant qu’espace physique se reconstitue comme style de vie marginal ; un style de vie dont les habitudes et les usages de la ville entrent le plus souvent en contradiction avec les rĂšgles, voire les lois en vigueur dans la sociĂ©tĂ© instituĂ©e. La zone, territoire de rĂ©sistances ?9 Le texte de James Cannon, qui se termine par cette Ă©vocation des zonards de la dĂ©cennie 1970, fait ainsi la jonction avec la suite du dossier. En retraçant l’ethnobiographie de Gavroche, JĂ©rĂŽme Beauchez engage en effet un dialogue avec un zonard des annĂ©es 1990 et 2000, dealer de drogues et voyou auto-proclamĂ©, sur le fond d’une anthropologie collaborative [2]. Tandis que le rĂ©cit de cette expĂ©rience de la zone Ă©nonce son code du deal et de la rue, le chercheur interroge les significations d’une telle conduite de vie dont il souligne moins la rĂ©sistance qu’une certaine conformitĂ© avec les principes les plus communs du commerce lĂ©gal et de la sociĂ©tĂ© instituĂ©e. Gavroche dĂ©crit en effet les savoir-faire, comme le savoir-survivre » Zeneidi-Henry, 2002 et les rĂšgles qui prĂ©sident Ă  son mĂ©tier de dealer ; un mĂ©tier dont l’exercice est articulĂ© aux espaces de la zone dans lesquels il fait figure de patron d’une petite entreprise criminelle centrĂ©e sur la maximisation du profit. Les moyens sont ceux des techniques de vente et de management oĂč la violence se justifie par les nĂ©cessitĂ©s d’un marchĂ© dont les Ă©changes – petits ou grands – alimentent un vĂ©ritable capitalisme de la rue. En pĂ©nĂ©trant de plain-pied cette zone partagĂ©e entre les commerces interlopes les plus cachĂ©s et les principes marchands les plus avouĂ©s, l’article offre une perspective incarnĂ©e sur une maniĂšre de vivre et de constituer un territoire dont la marginalitĂ© ne signifie aucunement l’opposition radicale ou l’absence de contact avec la sociĂ©tĂ© instituĂ©e. 10 Une Ă©chelle et un mode de description similaires ont Ă©tĂ© privilĂ©giĂ©s par Marcelo Frediani, dont l’enquĂȘte ethnographique conduite pendant la premiĂšre moitiĂ© des annĂ©es 1990 aux cĂŽtĂ©s des New Travellers en Grande-Bretagne Frediani, 2009 permet d’éclairer la gĂ©nĂ©alogie et le mode de vie de groupes qui ont fortement influencĂ© les gĂ©nĂ©rations actuelles de zonards français [3]. L’auteur dresse un portrait de celles et ceux dont il a partagĂ© la vie quotidienne en camion, sur les routes et dans des campements aussi sauvages qu’éphĂ©mĂšres ; une vie que l’auteur dĂ©crit comme adossĂ©e Ă  une culture alternative inspirĂ©e d’un syncrĂ©tisme d’influences marginales qui vont du mouvement hippie Ă  l’anarcho-punk, en passant par les spiritualitĂ©s new age, la musique Ă©lectronique et les free parties [4]. Tout l’enjeu du texte de Marcelo Frediani consiste dĂšs lors Ă  rassembler ces faisceaux d’influences et d’expĂ©riences autour de la question du besoin radical » d’espace qui aurait conduit les Travellers Ă  prendre la route. Que l’on ne s’y trompe pas un tel besoin n’est pas aussi trivial qu’un simple appel de la vie au grand air. S’il est radical, c’est justement parce qu’il rĂ©pond, selon le chercheur, Ă  une nĂ©cessitĂ© créée par les forces d’éviction du capitalisme nĂ©olibĂ©ral qui poussent les plus fragiles vers les marges du salariat et de l’habitat conventionnel. Il s’agit alors aussi bien d’échapper Ă  la spirale de l’enfermement dans les logiques du dĂ©classement que de combler ses besoins vitaux – se nourrir, se loger, nouer des rapports sociaux – et de s’engager dans une forme de radicalisme infrapolitique, ou de contre-culture, capable de constituer une alternative Ă  l’éviction. Cette alternative s’exprime au travers des communautĂ©s de pratique » que forment les Travellers en s’inscrivant dans des rĂ©seaux d’entraide fondĂ©s sur un socle de valeurs communes. Elle constitue Ă©galement une forme de retournement des stigmates qui conduit les Ă©vincĂ©s Ă  faire de leur Ă©viction un principe de libertĂ© ou, Ă  tout le moins, de rĂ©invention d’un espace du quotidien qui semble reprendre ses droits aux marges de la sociĂ©tĂ© instituĂ©e [5]. 11 Nombre de parallĂšles peuvent ainsi ĂȘtre tracĂ©s avec la zone de Gavroche dĂ©crite par JĂ©rĂŽme Beauchez. Dans les deux cas, l’engagement marginal relĂšve moins d’une opposition que d’une alternative aux fonctionnements socio-Ă©conomiques marquĂ©s par les logiques d’exclusion du capitalisme nĂ©olibĂ©ral. Tandis que Gavroche s’est contentĂ© de les retourner Ă  son avantage dans les territoires oĂč il s’est comportĂ© en patron de sa petite entreprise criminelle, les Travellers rencontrĂ©s par Marcelo Frediani ont pour leur part conçu une critique radicale de ces fonctionnements. Cela Ă©tant, pas plus que Gavroche, ils n’envisagent de fonder un mouvement qui aurait pour objet de promouvoir un changement de sociĂ©tĂ©. De leur point de vue, il s’agirait plutĂŽt d’échapper Ă  sa violence et de prendre le large, entre soi. 12 Un entre-soi que l’anthropologue et photographe Ralf Marsault a Ă©galement documentĂ© depuis sa longue expĂ©rience des Wagenburgen berlinoises. Celles-ci dĂ©signent les rassemblements de caravanes et de camions qui ont commencĂ© Ă  s’établir dans les friches et autres interstices de la ville peu aprĂšs la chute du Mur Ă  la fin de l’annĂ©e 1989 Marsault, 2010. Ouverts illĂ©galement, ces espaces oĂč se sont installĂ©s Travellers, punks et zonards issus de toute l’Europe avec une majoritĂ© de Britanniques et de Français font l’objet d’une certaine tolĂ©rance de la part des pouvoirs publics. De tels campements constituent un excursus europĂ©en Ă  l’histoire des Travellers retracĂ©e par Marcelo Frediani, de mĂȘme qu’une sorte de pendant germanique et fin de siĂšcle le xxe plutĂŽt que le xixe de la zone parisienne. À l’instar de cette derniĂšre, nombre de Wagenburgen se sont en effet Ă©tablies sur une ancienne zone militaire non aedificandi celle du no man’s land qui sĂ©parait l’Est et l’Ouest de Berlin Marsault, 2010, p. 36. Il n’est pas jusqu’à l’appellation de Wagenburg qui ne garde une connotation martiale, puisque le terme a d’abord dĂ©signĂ© une tactique de dĂ©fense consistant Ă  Ă©riger un mur de chariots » Wagen signifiant le vĂ©hicule et Burg l’idĂ©e de place forte pour parer les attaques de l’ennemi sur les champs de bataille. De loin en loin, cette idĂ©e semble perdurer aujourd’hui parmi les Wagenburger. La plupart conçoivent leur mode de vie Ă  la façon d’une rĂ©sistance – certes plus passive qu’agressive – impliquant une stratĂ©gie de repli qui les prĂ©serverait des obligations comme des injonctions Ă  la normalisation. Ralf Marsault se concentre alors sur les constructions qui font la Wagenburg – ses venelles, ses placettes et ses maisons –, et procĂšdent d’un ensemble de matĂ©riaux de rĂ©cupĂ©ration que les Wagenburger dĂ©tournent afin de concevoir une maniĂšre originale d’investir leur territoire et de l’habiter. Ce systĂšme d’objets est conçu par l’auteur comme la projection au sol des reprĂ©sentations qui animent les habitants. Au-delĂ  d’une simple figure du campement, cette hypothĂšse lui permet d’observer la Wagenburg comme une tentative de situationnisme sauvage qui n’est pas sans Ă©voquer une version punk de la Nouvelle Babylone imaginĂ©e par Constant [6]. Tracer les cartes de significations » d’une subculture marginale13 Outre les convergences dĂ©jĂ  relevĂ©es, les trois Ă©tudes prĂ©sentĂ©es au point prĂ©cĂ©dent partagent un mĂȘme intĂ©rĂȘt pour ces territoires qui sont le fait d’individus et de groupes Ă©voluant dans ce que Patrick Brunetaux et Daniel Terrolle Ă©d., 2009 ont appelĂ© l’ arriĂšre-cour de la mondialisation ». Depuis l’enracinement subjectif dans la zone de Gavroche jusqu’aux objets qui peuplent le territoire des Wagenburger en passant par le systĂšme de valeurs des Travellers, cette arriĂšre-cour a Ă©tĂ© investie par des enquĂȘtes qui, sans pour autant sacrifier Ă  une forme de romantisme des marges, ont refusĂ© l’essentialisation misĂ©rabiliste conduisant Ă  enfermer les pauvres dans leur pauvretĂ©, ou Ă  condamner les dĂ©classĂ©s au dĂ©classement. Par la mise en Ă©vidence du tout un savoir-survivre – fĂ»t-il parfois violent comme dans le cas de Gavroche –, il s’est plutĂŽt agi de souligner l’agentivitĂ© alternative [7] dont font preuve celles et ceux qui s’efforcent de construire une Ă©chappatoire et d’inventer leurs territoires en marge de la sociĂ©tĂ© instituĂ©e. Pour autant, celle-ci ne disparaĂźt pas d’un quotidien fait d’évitements, mais aussi de frottements plus ou moins rĂąpeux avec des institutions et des lois censĂ©es encadrer celles et ceux qui affichent leur souhait d’y Ă©chapper. 14 Ces frottements sont au cƓur de l’article signĂ© par CĂ©line RothĂ©, laquelle nous ramĂšne en France, pour conclure ce dossier par une rĂ©flexion sur la façon dont les zonards perçoivent et utilisent les dispositifs d’assistance qui leur sont destinĂ©s, en particulier celui d’un accueil de jour dit Ă  bas seuil d’exigence. Ce lieu est pris dans une nĂ©gociation permanente entre logiques zonardes et relatif effacement des travailleurs sociaux, qui maintiennent toutefois la prĂ©sence discrĂšte d’un cadre assorti de ses rĂšgles. Rien du style de vie des zonards n’est forclos de ce lieu les chiens y ont droit de citĂ© mais en nombre limitĂ©, tout comme les substitutifs aux opiacĂ©s dont la consommation addictive – comme celle d’autres substances – concerne un nombre consĂ©quent de celles et ceux qui disent avoir choisi la rue. L’idĂ©e d’un tel choix, comme ses mises en rĂ©cit, fournissent Ă  la chercheuse un matĂ©riau Ă  partir duquel sont interrogĂ©es des conceptions de la mobilitĂ© et du territoire qui voudraient renverser la situation de relative assistance dans laquelle la sociologue trouve ses enquĂȘtĂ©s. À ce titre, les lieux de l’urgence sociale ne sont pas de simples pourvoyeurs de services de premiĂšre nĂ©cessitĂ© ; ils apparaissent avant tout comme des lieux de socialisation zonarde et de requalification symbolique pour les reprĂ©sentants de ces groupes par ailleurs largement disqualifiĂ©s. 15 La recherche sur la zone et ses expĂ©riences n’en est encore qu’à ses balbutiements. Cette livraison d’Espaces et SociĂ©tĂ©s propose une premiĂšre articulation d’enquĂȘtes Ă  partir desquelles sont retracĂ©es quelques-unes des cartes de significations » qu’utilisent les zonards pour s’orienter dans leurs mondes [8]. Situer de tels rĂ©seaux de signifiance dans l’histoire et les espaces de la zone nous a conduits Ă  apprĂ©hender les diffĂ©rentes façons dont ses acteurs donnent du sens Ă  leurs conduites comme aux styles de vie qu’ils ont privilĂ©giĂ©s ; pratiques fondĂ©es dans une certaine promotion de la solidaritĂ©, mais qui se paye parfois au prix fort de la rue, dont les duretĂ©s n’épargnent pas ceux qui disent l’avoir choisie et l’aimer. 16 Si les anthropo-logiques zonardes sont des visions du monde et des solutions pour le vivre, leur comprĂ©hension de l’intĂ©rieur constitue dans le mĂȘme temps une condition sine qua non pour Ă©tablir une base de dialogue capable de faire socle Ă  une vĂ©ritable rencontre entre le monde des institutions et celui des zonards, lequel ne saurait ĂȘtre rĂ©duit Ă  un espace oĂč rĂ©gnerait l’anomie. Tandis que les communitas qu’ils forment apparaissent au premier regard comme des contre-structures » dont les dĂ©rĂšglements se heurtent aux principes organisateurs de la sociĂ©tĂ© instituĂ©e Turner, 1990, les enquĂȘtes prĂ©sentĂ©es ici laissent apparaĂźtre les multiples points de jonction qui nous rapprochent d’eux. Voici sans doute l’une des questions fondatrices des sciences sociales Ă  laquelle nous confronte l’étude de la zone. Car il en va ici comme de toute production d’altĂ©ritĂ©, qui soit maximise la dissemblance pour la cĂ©lĂ©brer ou la condamner, soit insiste sur la ressemblance afin d’annihiler les diffĂ©rences. PlutĂŽt que de la refermer, ce dossier ambitionne de rĂ©vĂ©ler une nouvelle facette de cette question, qu’il ne faut assurĂ©ment pas cesser d’ouvrir. Notes [1] Atget EugĂšne, 1913, Zoniers, sĂ©rie de photographies rĂ©alisĂ©es Ă  Paris entre 1899 et 1913, archivage sur le site internet de la BibliothĂšque nationale de France, [url consultĂ© le 14 avril 2017. [2] Beauchez a exposĂ© ailleurs la vision comme les dĂ©terminants biographiques de son enquĂȘte Beauchez, 2017. Tout comme Tristana Pimor a rĂ©flĂ©chi dans les colonnes d’Espaces et SociĂ©tĂ©s Ă  ces formes de symĂ©trie dans l’investigation qu’elle a coconstruite avec un groupe de zonards Pimor, 2016. [3] Sur le mĂȘme sujet, voir Ă©galement l’ouvrage pionnier de Kevin Hetherington 2000 ou les photographies publiĂ©es par Traveller Dave Fawcett, qui a mis en images sa communautĂ© nomade et leurs façons d’habiter en perpĂ©tuel voyage Fawcett, 2012. [4] Il s’agit de fĂȘtes techno tenues en plein air, le plus souvent sans autorisation et, donc, sur des terrains ou des champs squattĂ©s pour l’occasion. [5] Cette importance de la rĂ©appropriation d’un territoire en tant qu’ancrage d’une identitĂ© positive – et non plus seulement dĂ©finie par la nĂ©gativitĂ© du dĂ©faut ou du manque – a Ă©tĂ© soulignĂ©e par Emmanuel Renault et Djemila Zeneidi Ă  partir de l’enquĂȘte que celle-ci a menĂ©e pendant plusieurs annĂ©es dans une friche industrielle transformĂ©e en scĂšne artistique anarcho-punk Renault et Zeneidi-Henry, 2008. [6] New Babylon est une utopie architecturale pensĂ©e par Constant Nieuwenhuys, un artiste nĂ©erlandais fondateur du mouvement Cobra et compagnon de route de l’Internationale situationniste. L’idĂ©e fondatrice de la Nouvelle Babylone – Ă  laquelle Constant a travaillĂ© de 1956 Ă  1974, influençant toute une gĂ©nĂ©ration d’architectes et d’urbanistes – est que les relations sociales doivent ĂȘtre au principe de l’édification spatiale d’une ville nomade, entiĂšrement montĂ©e sur pilotis et dont les configurations sont conçues comme perpĂ©tuellement mouvantes les bĂątiments sont modulables au grĂ© des situations que crĂ©ent les habitants Ă  propos de l’Ɠuvre de Constant, voir Zegher et Wigley Ă©d., 2001. [7] Ou de documenter les compĂ©tences prĂ©caires », qui dĂ©signent les multiples savoir-faire et savoir-ĂȘtre, inĂ©galement protecteurs, acquis au cours de l’expĂ©rience de la prĂ©caritĂ© par les acteurs sociaux disposant de faibles ressources Ă©conomiques, sociales et symboliques Bouillon, 2009, p. 203-213. [8] Au sens oĂč Stuart Hall et Tony Jefferson ont Ă©crit que les cartes de signification » maps of meaning consistent dans les aspects d’une subculture Ă  partir desquels ses membres dessinent l’intelligibilitĂ© de leur environnement quotidien Hall et Jefferson Ă©d., 2006, p. 4. Une sociohistoire de la zone, espace de relĂ©gationLa zone, territoire de rĂ©sistances ?Tracer les cartes de significations » d’une subculture marginale RĂ©fĂ©rences bibliographiquesAngeras AnaĂŻs, 2012, Du nomadisme contemporain en France. Avec les saisonniers agricoles en camion, ouvrage ligneBeauchez JĂ©rĂŽme, 2017, L’ethnographe dans le sous-terrain fragments biographiques », Anthropologica, vol. 59, no 1, p. 101-113. En ligneBouillon Florence, 2009, Les mondes du squat. Anthropologie d’un habitat prĂ©caire, Paris, Presses universitaires de Patrick et Terrolle Daniel Ă©d., 2010, L’arriĂšre-cour de la mondialisation. Ethnographie des paupĂ©risĂ©s, Brignais, Les Éditions du Louis, 2002 [1958], Classes laborieuses et classes dangereuses Ă  Paris pendant la premiĂšre moitiĂ© du xixe siĂšcle, Paris, François, 2004 [1996], Les nomades du vide. Des jeunes en errance, de squats en festivals, de gares en lieux d’accueil, Paris, La Traveller Dave, 2012, Traveller Homes, Stroud, Amberley Marcelo, 2009, Sur les routes. Le phĂ©nomĂšne des New Travellers, Paris, Éditions ligneGarland David, 2001, The Culture of Control. Crime and Social Order in Contemporary Society, Chicago, University of Chicago Clifford, 2003 [1973], La description dense. Vers une thĂ©orie interprĂ©tative de la culture », L’EnquĂȘte de terrain, D. CefaĂŻ Ă©d., Paris, La DĂ©couverte, p. Stuart et Jefferson Tony Ă©d., 2006 [1976], Resistance through Rituals. Youth Subcultures in Post-War Britain, Londres-New York, Kevin, 2000, New Age Travellers. Vanloads of Uproarious Humanity, Londres-New York, Cassell. 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Alors quand la tĂ©lĂ©vision ne fait que nous pousser Ă  la consommation, comme les magazines, la radio, les affiches sur les abris bus ou les bĂątiments; ça m'plait pas. D'autant qu'on est influencĂ©s , que dis-je manipulĂ©s par les lobbyistes; dans le seul but de les enrichir, quitte Ă  le payer de notre santĂ©.
Image tirĂ©e des Noces Rebelles 2008 de Sam Mendes, dans lequel Leonoardo Di Caprio incarne un personnage tentant, en vain, de se mettre en marge de la sociĂ©tĂ©. La marge, taboue du XXIĂšme siĂšcle ? Marge commerciale, vie en marge, ne pas Ă©crire dans la marge » ; tout nous ramĂšne Ă  une vision pessimiste et nĂ©gative du concept. Pourtant, le latin margo, marginis dont il est issu signifie bord, bordure », attĂ©nuant dĂ©jĂ  l’aversion que nous pouvons en avoir. Si vivre Ă  la marge semble proscrit, commençons Ă  vivre de la marge, avec elle, peut-ĂȘtre en elle. En marge du monde Être considĂ©rĂ© Ă  la marge, marginal mĂȘme, sonne comme une insulte avilissante aux oreilles de la majoritĂ© de nos contemporains. Mal, peu ou pas insĂ©rĂ©s dans la sociĂ©tĂ©, les marginaux sont doublement relĂ©guĂ©s hors du monde ; du fait de leur condition liĂ©e Ă  la drogue, au hasard de la vie, mais aussi d’autres raisons bien plus banales mais aussi du qualificatif qui leur est doucement attribuĂ©. Ce sont les fameux outsiders, ou encore les dĂ©viants, vivant loin de la norme, hors normes. Si la norme est la moyenne de la sociĂ©tĂ© la normalitĂ© donc, prenons la tangente urgemment. Il n’y a rien de plus inquiĂ©tant, de castrateur ou d’aliĂ©nant que d’imager que l’on est, agit ou pense comme la moyenne. Non pas par mĂ©pris ou misanthropie, mais parce que la norme comme la moyenne n’existent pas elles sont des crĂ©ations de l’esprit pour tenter de saisir une rĂ©alitĂ©. La moyenne et la norme ne sont pas des entitĂ©s sociales, elles essaient d’agrĂ©ger des comportements, des profils et des pensĂ©es pour mieux les comprendre. Ainsi, la sentence ce n’est pas normal devrait prendre un sens poĂ©tique Ă  nos oreilles, nous satisfaisant que l’autre reconnaisse en nous une vivacitĂ© d’esprit et d’action qui nous rend unique. Être en marge n’est qu’ĂȘtre Ă  la pĂ©riphĂ©rie. La moyenne n’est que le point central qui permet de ne pas trop s’éloigner de la majoritĂ©, de la reprĂ©senter. Elle n’est pas un idĂ©al Ă  atteindre et surtout pas une identitĂ©. La marge est en rĂ©alitĂ© un appel Ă  dĂ©sobĂ©ir, Ă  affirmer sa singularitĂ© et son identitĂ© dans un monde contemporain qui se plait Ă  normaliser, consigner, massifier. Paradoxalement, c’est contre l’isolement et la perte de repĂšres que la marge se bat. En dĂ©fiant la normalitĂ© et la banalitĂ©, la marge nous impose Ă  repenser le monde. Rien ne doit ĂȘtre normal, habituel, attendu c’est l’imprĂ©visibilitĂ© et l’irrĂ©versibilitĂ© qui fondent l’Homme et le monde. Ce sont donc la dĂ©sobĂ©issance civile, la rĂ©volte intellectuelle, la volontĂ© de penser qui Ă©mergent grĂące Ă  la marge. La marge, une libertĂ© C’est ainsi que la marge devient une libertĂ©. D’aliĂ©nante parce que contrainte reprenons l’exemple des marginaux qui, souvent, subissent l’isolement et la perte des liens sociaux, la marge devient libĂ©ratrice parce que choisie, dĂ©libĂ©rĂ©e et souhaitĂ©e elle devient un espace dans lequel peut s’exercer quelque chose » CNRTL. Alors que la sociĂ©tĂ© semblait avoir créé une sphĂšre unique dans laquelle nous devons Ă©voluer, de grĂ© ou de force, sacrifiant sur l’autel de la vie sociale notre vie privĂ©e ; la marge vient nous donner une bouffĂ©e d’oxygĂšne, nous autorisant Ă  sortir de la sociĂ©tĂ©. En calibrant notre libertĂ©, en lui donnant un pĂ©rimĂštre plus ou moins permĂ©able, la marge vient la dĂ©cupler. La plus haute dĂ©finition de la LibertĂ© est celle qui ne nous Ă©chappe pas l’autonomie et la responsabilitĂ©, deux piliers fondateurs de la LibertĂ©, ont besoin d’évoluer au sein d’un cadre pour pleinement se dĂ©ployer. Ainsi, les marges de tolĂ©rance ou d’erreur sont bien plus qu’une dĂ©viance acceptĂ©e dans une vie millimĂ©trĂ©e. Elles sont la porte ouverte sur un autre monde, qu’il nous suffit de passer pour le connaĂźtre. La marge tolĂ©rĂ©e laisse l’imprĂ©visible se glisser dans notre vie, il faut alors se prĂ©cipiter pour l’embrasser et ne plus jamais le laisser s’évanouir. Doucement, s’immisce le chaos dans notre vie, nous rendant encore plus vivants et humains. L’expression avoir de la marge, en tant que latitude accordĂ©e, couronne la prise de conscience de nos sociĂ©tĂ©s. Il s’agit de quitter le tout-contrĂŽle pour autoriser l’erreur et l’échec. La marge devient un jeu entre les limites, parfois mĂȘme avec les limites ; dĂ©ferlant notre dĂ©sir, tel un moteur vital. A la marge, l’intime La marge, en effet, joue avec toutes les limites. Les limites lĂ©gales, politiques, sociales, mais aussi spirituelles, corporelles et sentimentales. Initialement, la marge Ă©tait imaginĂ©e telle un espace situĂ© sur le pourtour externe immĂ©diat de quelque chose » ou encore un espace laissĂ© entre la limite de deux choses se cĂŽtoyant ». Oui, la marge nous rapproche de l’intime, interrogeant la place de la limite entre deux corps, deux Ăąmes ; mais questionnant Ă©galement ce qu’est le pourtour externe immĂ©diat dans un duo. Pourtant, ĂȘtre Ă  la marge, pourrait-on dire, revient Ă  ĂȘtre Ă  l’écart. Encore une fois, l’écart fait frissonner, rimant avec exclusion, retrait du monde et perte d’identitĂ© ; mais aussi rejet de l’autre. Non, affirme François Jullien c’est par Ă©cart, en le dĂ©tachant du proche, du semblable, de l’apparent Ă©quivalent, qu’on voit poindre enfin un autre qui soit autre ». Autrement dit, c’est en mettant Ă  la marge l’Autre qu’il devient Lui, qu’il existe. PlacĂ© Ă  la marge, l’Homme se met Ă  exister parce que lui est laissĂ©e une latitude pour ĂȘtre. NĂ©anmoins, convenons que la frontiĂšre est fine entre une marge bĂ©nĂ©fique, celle qui permettra Ă  l’Autre d’ĂȘtre Lui afin de me revenir dans une folie intime ; et une marge mortifĂšre, qui gĂšle l’humanitĂ© en l’Autre parce que niĂ© dans son individualitĂ©. C’est encore une fois chez Jullien que l’on trouvera la solution rencontrer, c’est se laisser dĂ©border et dĂ©porter par l’Autre, commencer de lever la barriĂšre d’avec lui ». Seule la rencontre, le regard posĂ© sur l’Autre, lui fera connaĂźtre une marge bĂ©nĂ©fique. Et rĂ©ciproquement. Conclusion Traiter de la marge sans penser Ă  l’édition serait finalement une erreur. En effet, la premiĂšre des marges aurait pu ĂȘtre celle de l’ouvrage ou du monde de l’édition. Les dĂ©finitions de la marge nous le rappellent entre l’ espace vierge laissĂ© entre le pourtour de ce qui est imprimĂ© texte, gravure et le bord de la page » et l’ espace vierge laissĂ© Ă  droite du recto et Ă  gauche du verso d'une page imprimĂ©e et gĂ©nĂ©ralement Ă  gauche d'une page manuscrite » CNRTL. La premiĂšre fois que l’on croise une la ? marge, c’est dans un ouvrage. Elle nous apporte confort de lecture, laissant parfois pour certains d’entre nous la possibilitĂ© d’annoter les quelques lignes placĂ©es sous notre regard. La marge amĂ©liore aussi notre Ă©criture, nous donnant droit Ă  l’erreur et Ă  la correction. La marge d’un livre, que l’on soit auteur ou lecteur, est cet espace immaculĂ© qui vient entourer, respectivement, le fruit de notre production ou de notre dĂ©sir. Cette marge blanche nous laisse le droit de rĂȘver, de penser le monde diffĂ©remment, de nous identifier Ă  ces personnages, de nous transporter sur les lieux de leur action, de nous oublier dans les majestueuses descriptions. Elle nous ramĂšne aussi Ă  la raison, lorsque la marge disparaĂźt. Les derniĂšres pages du livre sont blanches, ne laissant plus Ă  la marge la possibilitĂ© d’exister. Brutalement, aprĂšs des milliers de mots qui nous transportaient en mĂȘme temps hors et dans le monde, nous voici ramenĂ©s Ă  la dure rĂ©alitĂ©. En poursuivant la mĂ©taphore Ă©ditoriale, l’on pourrait dire que la lecture et l’écriture sont entourĂ©es par la marge. En rĂ©alitĂ©, elles forment la marge dont nous avons besoin, si la marge est l’ extension de quelque chose au-delĂ  des limites normalement nĂ©cessaires, requises ou prĂ©vues » CNRTL. Oui, la lecture Ă©tire le temps et l’espace de notre vie plus loin que nĂ©cessaire, alors que nous n’avons pas besoin de lire pour vivre. La marge dĂ©fait le nĂ©cessaire et le prĂ©vu, et injecte une dose de contingence et d’imprĂ©visibilitĂ© dans nos vies. C’est la lecture qui vient frapper notre conscience, comme pour rĂ©veiller notre Ăąme de contemplateur, d’esthĂšte et de rĂȘveur. La facultĂ© d’imagination, conduisant Ă  la comprĂ©hension et au jugement, est le symbole de la pluralitĂ©, du commencement et de l’irrĂ©versibilitĂ© ; bref de l’HumanitĂ© chez Arendt. Il n’y a rien de plus magistral que d’imaginer. Or, cette facultĂ© est prĂ©cisĂ©ment exercĂ©e par l’écriture et la lecture. Un homme, un jour, lira. Et puis tout recommencera. Nous l’espĂ©rons avec vous, Madame Duras en 1985. Guillaume Plaisance
etles femmes et la libertĂ© de chacun y compris dans le choix de son mode de vie. Il appartient Ă  l’école de faire vivre ces valeurs, de dĂ©velopper et de conforter le libre arbitre de chacun, de garantir l’égalitĂ© entre les Ă©lĂšves et de promouvoir une fraternitĂ© ouverte Ă  tous. En protĂ©geant l’école des revendications communautaires, la loi conforte son rĂŽle
Quand on pense au statut d’artiste aujourd’hui, on imagine surtout un homme entre deux Ăąges, dans un atelier ou un bureau, la nuit, sale et pas douchĂ© depuis des jours en train de peindre dans la pĂ©nombre Ă  la lueur d’une bougie. C’est le mythe de l’artiste maudit Il est si bien ancrĂ© que si un artiste actuel rĂ©ussit et gagne bien voire trĂšs bien sa vie, on estime que c’est un vendu et que son Ɠuvre est commerciale. Mais qui sommes-nous pour en juger ? Ce mythe de l’artiste maudit impacte Ă©galement notre propre crĂ©ativitĂ©. Il est, en partie, la raison pour laquelle tu n’oses pas et tu n’assumes pas ta crĂ©ativitĂ©. Dans cet article, je vais dĂ©construire ce mythe et t’aider Ă  le dĂ©passer. Qu’est-ce que le mythe de l’artiste maudit ? Il s’agit d’un stĂ©rĂ©otype trĂšs rĂ©pandu sur le mode vie des artistes et sur leur personnalitĂ©. Voici quelques-unes des idĂ©es reçues sur les artistes. idĂ©es reçues sur les artistes L’artiste serait anticapitaliste Parce que les mĂ©tiers artistiques sont motivĂ©s par une passion, il est frĂ©quent de croire que l’artiste n’a pas besoin d’argent, voire pire qu’il le rejette. L’argent serait l’ennemi de son art et la richesse la fin de son inspiration. L’artiste serait pauvre Parce qu’il refuse de gagner de l’argent, l’artiste est forcĂ©ment pauvre. Il vit dans de mauvaise conditions de vie et n’a pas d’ambitions L’artiste vivrait en marge de la sociĂ©tĂ© Il tient par-dessus tout Ă  sa libertĂ© et il est prĂȘt Ă  tout sacrifier pour elle. Il ne se plie pas aux conventions sociales et il vit comme il l’entend. Il ne croit pas Ă  la fidĂ©litĂ© conjugale, il est volage, rebelle et contre toute contrainte. L’artiste serait incompris De par sa mise Ă  l’écart de la sociĂ©tĂ©, l’artiste est une personne incomprise, rejetĂ©e par les gens normaux. Personne ne comprend ses Ɠuvres ni ses intentions et personne ne le soutient. L’artiste ne pourrait rĂ©ussir seul Étant incompris, l’artiste est incapable de vendre ses oeuvres. Il a besoin d’un mĂ©cĂšne ou d’un galeriste pour rĂ©ussir. Il devient par la mĂȘme dĂ©pendant de lui. L’artiste crĂ©erait dans la souffrance C’est la souffrance qui serait au cƓur de l’inspiration de l’artiste. Sa mise au ban de la sociĂ©tĂ© et sa soif de libertĂ© irrĂ©aliste le rendrait en colĂšre, triste et déçu. C’est de ces Ă©motions nĂ©gatives que naitraient ses plus grandes Ɠuvres. Les Ă©motions positives ne lui inspireraient rien. L’artiste travaillerait nuit et jour Ce serait le seul moyen Ă  sa disposition pour rĂ©ussir travailler sans relĂąche. Et comme les Ă©motions nĂ©gatives sont son inspiration, il est constamment déçu de ce qu’il crĂ©e. L’artiste serait perfectionniste. PersuadĂ© que son Ɠuvre n’est jamais assez bien. L’artiste serait irresponsable Épris de libertĂ© et constamment insatisfait, l’artiste est complĂštement irresponsable. Il est constamment en retard, ne sait tenir aucun dĂ©lai, emprunte de l’argent sans pouvoir le rembourser et n’a pas de vie stable. Cette liste n’est pas exhaustive et il y en bien d’autres idĂ©es rĂ©pandues sur les artistes. Si tu en as d’autres, donne-les moi en commentaire. Mais d’oĂč viennent ces idĂ©es et ce mythe de l’artiste maudit ? D’oĂč vient le mythe de l’artiste maudit Le statut d’artiste n’a pas toujours eu mauvaise presse et encore moins cette image misĂ©rable. Il a Ă©tĂ© encensĂ©, encouragĂ© au cours des siĂšcles passĂ©s et les familles d’artistes Ă©taient fiĂšres de ce statut. Ce n’est qu’au 19Ăšme siĂšcle, avec l’arrivĂ©e de la photographie que la fonction des artistes Ă  radicalement changĂ©e. Avant, les artistes faisaient un travail de tĂ©moins, de conteurs et de mĂ©morialistes. Ils rĂ©alisaient les portraits de familles, peignaient les guerres passĂ©es, les paysages de l’autre bout du monde ou reprĂ©sentaient une histoire mythologique. Et puis la photographie est arrivĂ©e. Les familles ont pu se faire tirer le portrait beaucoup plus vite et pour beaucoup moins cher. Les guerres Ă©taient photographiĂ©es en tant rĂ©el et les images Ă©taient bien plus fidĂšles Ă  la rĂ©alitĂ©. Les paysages de l’autre bout du monde Ă©taient photographiĂ©s de façon plus objective. Il n’y a que la mythologie que la photographie ne pouvait fixer. Les peintres et artistes se sont retrouvĂ©s au dĂ©pourvu. Ne sachant comment se rĂ©inventer. Mais les plus jeunes d’entre eux y ont vu une libertĂ©. Ils ont dĂ©cidĂ© de s’affranchir des codes graphiques en vigueur jusque lĂ  et on cherchĂ© Ă  dĂ©velopper leur propre style. C’est ainsi que sont arrivĂ©s les impressionnistes par exemple. Puis plus tard les cubistes, les peintres abstraits etc AprĂšs des siĂšcles de reprĂ©sentation codifiĂ©e, les mĂ©cĂšnes et les amateurs d’art ont eu bien du mal Ă  comprendre et Ă  accepter ses mouvements. D’oĂč le clichĂ© de l’artiste incompris. Et comme les experts en art ne comprenaient pas, ils n’exposaient pas ces artistes et ne leur achetaient pas leurs Ɠuvres. Les artistes n’ont pas beaucoup gagnĂ© d’argent. Mais ils croyaient en leur travail et ils ont continuĂ© Ă  crĂ©er coĂ»te que coĂ»te. D’oĂč l image de l’artiste pauvre et en marge de la sociĂ©tĂ©. C’est la pĂ©riode que l’on a appelĂ© la bohĂšme. En rĂ©fĂ©rence aux bohĂ©miens qui vivaient dans la pauvretĂ© et de par leur itinĂ©rance, Ă©taient soit disant libres. En gros on les comparait Ă  EsmĂ©ralda. La bohĂšme a Ă©tĂ© dĂ©crite par de nombreux artistes, en peinture ou en Ă©criture. Par zola dans son roman L’Ɠuvre, par Rimbaud et Verlaine etc. De ces Ă©crits et de ces peintures, ont Ă©tĂ© tirĂ©s des films, d’autres romans, des chansons etc. Cette pop culture a vĂ©hiculĂ© le mythe de l’artiste maudit jusqu’à nos jours. Pourtant l’image de l’artiste flĂąnant en opposition au travailleur est ancrĂ©e depuis plus longtemps que le 19Ăšme siĂšcle. Repense Ă  la fable de la cigale et la fourmi par exemple. En quoi le mythe de l’artiste maudit est-il faux Il est faux parce qu’il suppose que tous les artistes du monde et de l’histoire fonctionnent et fonctionnaient de la mĂȘme façon. Nous avons rencontrĂ© assez de gens pour savoir que nous rĂ©agissons et pensons diffĂ©remment mĂȘme si nous avons le mĂȘme mĂ©tier. La preuve, Henri Matisse a peint des danses joyeuses dans ses tableaux alors qu’il luttait contre un cancer. Loin de crĂ©er dans la souffrance, il s’est servi de l’art pour se changer les idĂ©es. De nombreux artistes gagnent leur vie avec leur art aujourd’hui. Ne serait-ce que dans le milieu de la chanson, du cinĂ©ma ou du théùtre. Et si le montant des salaires peut parfois nous sembler un peu dĂ©raisonnable, cela ne nous choque plus. Alors pourquoi cela nous choque-t-il toujours quand il s’agit de peintre, de sculpteur, de photographe ou de tout autre art ? En quoi le mythe impacte notre crĂ©ativitĂ© Depuis notre plus tendre enfance, la sociĂ©tĂ© n’a pas vraiment encensĂ© le statut d’artiste. Elle a elle-mĂȘme vĂ©hiculĂ© le mythe de l’artiste maudit. En crĂ©ant, donc en dessinant, en brodant, en tricotant, en faisant notre passion dans notre coin nous avons l’impression d’aller Ă  l’encontre de ce que la sociĂ©tĂ© nous a appris. Nous sommes persuadĂ©es que ce n’est pas un vrai mĂ©tier, que cela doit se pratiquer dans le secret, que c’est une honte et une perte de temps. Nous ne crĂ©ons pas dans la souffrance et nous sommes donc sĂ»res de ne pas vraiment ĂȘtre artistes ni crĂ©atives. Je t’entends d’ici dire “non non mais c’est une toute petite activitĂ©, que je fais pour moi seule”. Nous ne voulons pas ĂȘtre mises au ban de la sociĂ©tĂ© et donc nous n’assumons pas cette crĂ©ativitĂ©. Tu vois Ă  quel point ce mythe est nocif pour ta crĂ©ativitĂ© ? A quel point il est important de s’en dĂ©faire pour assumer sa crĂ©ativitĂ© ? Se dĂ©faire du mythe de l’artiste maudit Un pas Ă  la fois. Ce mythe est tellement ancrĂ© en nous que tu n’arriveras pas Ă  t’en dĂ©faire en un jour. Mais en ayant conscience que c’est un clichĂ© et qu’il n’est pas rĂ©el, tu peux dĂ©jĂ  amĂ©liorer ton statut de crĂ©ative chaque jour. Commence par accorder du temps Ă  ta crĂ©ativitĂ©. Cesse de la faire passer en dernier. Tu as le droit d’ĂȘtre crĂ©ative et de vouloir passer du temps Ă  crĂ©er. Ensuite tu peux commencer Ă  crĂ©er un peu plus devant les autres, ou alors Ă  montrer un peu plus tes crĂ©ations. D’abord Ă  des personnes bienveillantes, pour ĂȘtre sĂ»re de ne pas recevoir trop de commentaires nĂ©gatifs qui te feraient revenir dans ta taniĂšre. La suite c’est de te t’assumer et de te prĂ©senter en tant que femme crĂ©ative. Oui oui, sans bafouiller, sans bĂ©gayer et sans minimiser. L’étape finale c’est de le crier sur tous les toits et d’en ĂȘtre fiĂšre ! au point d’exposer tes crĂ©ations chez toi et de les offrir autour de toi. Ou mĂȘme pourquoi pas de franchir le cap et de les vendre. Dans le cadre lĂ©gal, cela va de soi. J’espĂšre que cet article t’aura aider Ă  prendre conscience du mythe de l’artiste maudit et t’invitera Ă  le dĂ©construire aussi pour assumer ta crĂ©ativitĂ©.
VivreEn Marge De La Societe Original Qui Vit En Marge De La Societe Il Vit En Marge De La Societe; Se Met En Marge De La Societe; Jeune Vivant Plus Ou Moins En Marge De La Societe; En Marge De La Societe; Mode De Vie Des Artistes En Marge De La Société; Il Vit Sans Regles, En Marge De La Societe; Mene Une Existence Au Jour Le Jour En
La compagnie de production Tour de Bras prĂ©sente les Rencontres de Musiques SpontanĂ©es numĂ©ro 32 les 7, 9 et 10 octobre prochain, Ă  la CoopĂ©rative Paradis de Rimouski. Le festival de musiques improvisĂ©es accueillera des artistes quĂ©bĂ©cois, canadiens et internationaux. Soulignons au passage la prĂ©sence de l’important musicien Ă©lectroacoustique Erikm, du rĂ©putĂ© Quatuor Bozzini ainsi que des musiciens d’Hubert Lenoir dans le projet DooDooDoo. Le festival prĂ©sentera Ă©galement des musiciens essentiels des musiques crĂ©atives europĂ©ennes, dont la percussionniste Camille Émaille et le trompettiste et manipulateur de synthĂ©tiseurs tchĂšque Petr Vrba. Cet automne, Tour de Bras s’associe au Quatuor Bozzini pour faire rayonner les musiques nouvelles Ă  travers le QuĂ©bec avec l’évĂ©nement QuĂ©bec Musiques ParallĂšles QMP. QMP est association informelle d’artistes, de producteurs et de diffuseurs, de lieux Ɠuvrant sur des routes parallĂšles, en marge de l’industrie, reliant les rĂ©gions et les grands centres. Humainement et virtuellement. Sous la double direction artistique d’Isabelle Bozzini et d’Éric Normand, l’évĂ©nement souhaite faire rayonner les musiques de crĂ©ation d’ici dans toutes les rĂ©gions du QuĂ©bec et hors des grands centres. Ne ratez pas nos concerts Ă  Matane, RiviĂšre-du-Loup, L’Isle-Verte et Albertville! Tous les concerts des RMS 32 s’inscrivent dans la programmation de QuĂ©bec Musiques ParallĂšles. Programmation complĂšte CoopĂ©rative Paradis, Rimouski Le jeudi 7 octobre 20 h – ErikM // Camille Émaille trio ErikM – Idiosyncrasie Camille Émaille en trio avec Petr Vrba et Éric Normand Le samedi 9 octobre 20 h – DooDooDoo // Haliriki Co-prĂ©sentĂ© avec E27 et Suddenly Listen DooDooDoo Pierre-Emmanuel Beaudoin, batterie Alexandre Martel, traitement sonore Lou-Adriane Cassidy, traitement sonore Jean-Étienne Colin-Marcoux, traitement sonore Haliriki Norman Adams, violoncelle Brandon Auger, Ă©lectroniques Éric Normand, basse et effets Antoine LĂ©tourneau-Berger, percussions et Ă©lectroniques Le dimanche 10 octobre 19 h – Quatuor Bozzini + RĂ©my BĂ©langer de Beauport // LĂ -dehors. » Quatuor Bozzini Clemens Merkel, violon StĂ©phanie Bozzini, alto Isabelle Bozzini, violoncelle Alissa Cheung, violon RĂ©my BĂ©langer de Beauport LĂ -dehors Eric Brochard, Spatialisation, reverb et traitement informatique EriKm, Lutherie informatique LoĂŻc GuĂ©nin, Percussions, objets acoustiques trouvĂ©s, voix Les billets sont disponibles sur Quoi Vivre Ă  Rimouski Autres spectacles prĂ©vus au Bas-St-Laurent et en GaspĂ©sie 6 octobre – Matane Camille Émaille + Petr Vrba + Éric Normand / ErikM 7 octobre – Albertville NOORG / Quatuor Bozzini 8 octobre – RiviĂšre-du-Loup Camille Émaille + Petr Vrba + Éric Normand / ErikM 9 octobre – Mont-Louis NOORG / Quatuor Bozzini 17 octobre – L’Isle-Verte – Quatuor Bozzini / Chorale Joker F4fCMzI.
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